Ce film part avec un avantage unique, avantage qu'aucun autre
film de super-héros ne possèdait jusqu'à
présent : ouvrir totalement le champ des possibilités,
se libérer d'un véritable carcan scénaristique,
de trames sclérosées par des happy ends évidentes
et, pour une fois, une seule peut-être, ne laisser aucune
chance à ces indestructibles héros. Sur le papier
en tous les cas : mais on s'apercevra au bout de 30 minutes
que venir après Infinity wars n'était
pas chose facile. Car Endgame n'osera jamais
faire exploser les verrous de son histoire, n'osera jamais franchir
les limites d'une production hollywoodienne, n'osera jamais
caresser le public à rebrousse-poil (alors qu'il n'est
là que pour cela !!!) ; le film n'osera presque jamais
aller au bout de cette succulente idée qui m'a tant fait
saliver...
Pourtant nous partions conquis : Endgame se
permet de plier le film auquel on s'attendait en un petit quart
d'heure, puis de recoller agréablement les morceaux de
ce futur recomposé, de renouer agréablement avec
chacun des personnages. Avant de plonger dans le grand bain.
Car voilà que, derrière un tout nouveau pitch
destiné à remettre nos héros sur de bonnes
rails, le scénario se surprend à s'excuser (c'est
pas moi qui le dit, c'est Tony), à se confondre en facilités
indignes (la scène où Banner convainc "The
ancient one" ne tient pas debout), à jouer les magiciens
(les apparitions à bon escient de Captain Marvel sont
délirantes) et, enfin, à se transformer en une
bouffonnerie de très bas étage, qui plus est totalement
incohérente (par rapport aux films précédents).
J'en veux pour preuve, au sujet de cette dernière, l'immonde
personnage qu'est devenu le pourtant fascinant Hulk (la faute
à des films antérieurs qui n'ont jamais su décoller
au box office ; et histoire de lui préparer un futur
au cinéma ?) et la métamorphose du soudainement
pitoyable Thor (raccord avec son 3ème opus...) en un
vulgaire humain insupportable ; d'autant plus que les défauts
qui lui sont prêtés sont ceux qu'aucun scénariste
n'a voulu coller à T. Stark, alors que ceux-ci faisaient
partie intégrante de son personnage. Mais je m'égare.
Heureusement l'idée fait son chemin petit à petit,
tisse une toile scénaristique, bien qu'un peu diaphane
et surtout très limpide, puisqu'aucun enjeu lourdement
dramatique ne viendra l'étayer. La thématique
utilisée aurait très bien pu être travaillée,
tordue et déboucher ainsi sur quelque chose de plus aboutie
; donner un autre regard sur les scènes précédentes,
un point de vue différent, bien mieux qu'un simple clin
d'oeil. Mais, justement, cela n'aboutit jamais à la pirouette
scénaristique attendue, sur le rôle central de
Thanos par exemple, voir les raisons cachées de sa folie
vis à vis, notamment, de la Terre. Ca reste un plaisir
gratuit, une mine d'or laissée à l'abandon. Sans
un tissus scénaristique plus ténu, le plus cruel
défaut de ce Endgame réside assurément
dans l'absence d'émotions, devenant un louable -très
louable et émouvant sur la fin- hommage appuyé
mais quelque peu raté au MCU et aux comics en général.
Un listing un rien hasardeux qui n'implique que la récente
nostalgie du fan de base, l'égo d'un spectateur qui de
toutes façons attendait ce feu d'artifice final. En tout
état de cause ce dernier opus ne sera qu'un replay de
3 heures au scénario lourdement asséné
et à la majorité des dialogues assez pisseux.
Restera un personnage qui submerge, fidèle à lui-même
et toujours aussi prestigieusement interprété
: Thanos.
Pour couronner le tout, les deux frangins nous apportent sur
un plateau une réalisation qui manque d'ambition, voir
d'imagination : le plan séquence utilisé lors
de la ré-apparition de Hawkeye aurait tellement mieux
servi le combat final. Un peu fade.
C'est clairement un film au trop plein d'imperfections, un trop
gigantesque cadeau fait aux fidèles d'entre les fidèles,
ceux qui ont suivi assidument TOUT le MCU -merci aux personnes
qui ont raté la moitié des métrages de
rester chez elles-. Jusqu'à l'apparition inattendue de
Jarvis (enfin !) : petite distraction personnelle... Heureusement
que la dernière heure -et tout particulièrement
la dernière demi-heure-, est tellement époustouflante
qu'il en devient impossible de bouder son plaisir. De combats
titanesques en une conclusion ébouriffante, d'images
qui en mettent plein la vue en d'autres à l'intimité
flagrante, le film repousse le spectateur et le fan dans ses
derniers retranchements. Comme pour nous inviter, tous, à
ce deuil des Avengers dont ce Endgame est
le dernier tome... Petite larme oblige.
Un adieu trop tardivement réussi... mais bon sang que
ce final est beau, riche d'émotions pures et d'un clin
d'oeil absolument bien digéré qui pointe du doigt
les fans purs et durs de Captain America. Moi...
Seconde séance : Pas la même attente, plus
de (mauvaises) surprises, donc la seconde vision est un poil
supérieure... Mais mieux vaut ne regarder ce film -historique
à bien des niveaux, et que j'aurai tellement adoré
aimer- seulement au premier degré !
Un deuxième regard prouve combien celui-ci est linéaire
et plein d'incohérences inhérentes aux retours
dans le passé, aux différences de temps dans le
domaine quantique...etc. Ca reste un hommage monumental qui
préfère la facilité ; comme un claquement
de doigts. Le film manque de densité et d'enjeu, les
scènes dans New York et Asgard sont clairement et complètement
foireuses. Par contre j'ai été surpris de voir,
même après deux jours, combien les gags et l'émotion
passent toujours aussi bien la barrière de l'écran.
Sincèrement, mis à part quelques piques géniales,
les deux réalisateurs sont plus proches de M. Bay que
de C. Nolan (jusqu'à lui piquer un "lance flare"
sur fond de soleil couchant, appuyé par un ralenti) ;
l'hommage au travail de Whedon est quasi inexistant.
Il suffit pas de nous laisser sur les plus belles scènes
du MCU pour gagner (tout) notre cœur.
N.B. : Je suis triste, en tant que cinéphile, de voir
que le gag de Big Lebowski tombeà l'eau
et alors que 2 secondes plus tard le public rit grassement lorsque
Thor rote sonorement...
NOTE : 13-14 / 20