Un Star wars qui n'est pas tout à fait un Star wars
et qui, je pense, devrait avoir du mal à conquérir
les puristes ; mais peut-être qu'un tout autre public
se profile. J'ai simplement trouvé qu'il manquait une
chose essentielle à ce film, pourtant situé dans
la droite ligne chronologique des autres oeuvres de la saga
galactique, une chose qui cimente les différents épisodes
: l'émotion. Emotion entrainée par l'analogie
aux mythes fondateurs (ici on s'en tiendra essentiellement à
la guerre), par les relations étroites entre les personnages
(assez froides dans ce segment, et peu développées)
et l'importance capitale des divers liens familiaux (Cf. la
paternité explorée sur la première moitié
du film). Je ne dis pas qu'il n'y a pas de l'émotion
dans Rogue One : mais celle-ci se situe à
un autre niveau ; et je ne parle pas du final...
Car la fin de ce film, tout bon fan la connaissait déjà
avant de l'aborder dans la mesure où les évènements
narrés dans l'épisode 4 ne font aucun doute sur
celle-ci. Alors oui : l'émotion existe, sur le papier,
de façon même plutôt osée dans ce
type de production. L'émotion est là quand, enfin,
on voit sur l'écran les minutes qui ont précédé
le tout début d'Un nouvel
espoir, prémisses aussi floues que frustrantes à
l'époque, et la savoureuse explication de son titre.
Sauf que le film qui précéde cette fin en apothéose
n'est pas à la hauteur, hésitant sans cesse entre
classicisme et banalité.
C'est assurément un film de guerre, guerre galactique
XXL qui rend un hommage vibrant à ces rebelles que l'on
découvrait plus en tant que figurants que comme de grandioses
héros dans les épisodes suivants ; film d'aventure
où l'on va découvrir une toute nouvelle équipe.
L'équipe, justement, parlons-en : car c'est sans aucun
doute elle qui constitue la plus grande faiblesse du film, nous
enmpêche d'y plonger sans arrière-pensées
et de transcender notre émotion. Hors mis Jyn qui, très
justement, prend toute la place dans la mesure où son
passé dramatique permet au personnage d'exister pleinement
à l'écran, les liens familiaux que j'évoquais
au début permettant de toucher notre corde sensible ;
hors mis Jyn, donc, les autres personnages font pâle figure.
A peine entrapercevons-nous la brutalité de Cassian -version
très fade d'un Han Solo-, alors que le personnage méritait
un bien plus ample développement ; il restera un mystère
total et il deviendra extrêmement difficile de s'y attacher
un tant soit peu au vu de la distance qui est mise entre lui
et le spectateur. Si ce n'est le lien qu'il offre avec la Force
/ religion, Chirrut restera un rien caricatural, partagé
entre la puissance d'un personnage aveugle, illuminé
sublime et un ninja totalement décalé dans cet
univers. Baze restera un faire-valoir dont le mystère,
l'absence de traits psychologique autre que la fidélité,
empêche toute empathie... On espérait également
de petits clins d'oeil habillement placés concernant
Saw Guerrera, personnage connu et fascinant de l'univers Star
wars : par exemple le rappel de son trauma (la mort de sa soeur)
et de son extrêmisme, autre que par de vagues mots...
Passons rapidement, car il s'agit moins de scénario que
de FX, sur l'abominable marionnette numérique de Grand
Moff Tarkin, trop approximative pour la laisser bavarder aussi
longtemps (la surprise -si on peut l'appeller comme cela- finale
est bien plus réussie).
Alors oui, je suis très négatif concernant les
personnages, mais je tenais à dire que cela n'empêchera
nullement le fan hard core de se régaler des nombreux
clins d'oeil : de la ferme hydroponique à Vader, en passant
par certains droïdes et quelques guest dont un que l'on
retrouvera avec plaisir dans une certaine Cantina et dans un
rôle similaire... Par contre je ne m'explique pas l'absence
de l'amiral Ackbar... Et puis oui : K-2SO est une complète
réussite, tant sur le plan visuel que sur le plan "humain".
Rogue One reste un film de guerre spatiale
de toute beauté, efficace s'il en est et mené
tambour-battant, bel hommage aux diverses formes de résistances
à travers l'histoire et face aux dictateurs de tout poils.
G. Edwards nous livre un travail que l'on pourrait mettre exactement
entre celui de Lucas (très pictural) et celui de Kershner
(plus mouvementé). Il offre également et visuellement
une parfaite transition avec le reste de la saga (les vaisseaux
genre "Tantive IV", les troopers de plus en plus immaculés...).
Cependant il n'en reste pas moins assez basique dans sa trame
: gropuscules de résistants rebelles aux ordres, mission-suicide
et quelques facilités scénaristiques un peu trop
bienvenues (une trappe qui s'ouvre à bon escient, des
personnages qui reviennent au bon moment, des objets qui se
trouvent au bon endroit...etc). Ca manque d'un scénario
plus technique, plus alambiqué, rebondissant, au suspens
mieux maîtrisé afin de mieux nous enchanter et
même nous surprendre , je le répète : quel
fan n'imaginait pas le film s'achever ainsi ? Malgré
cette bataille titanesque et hautement plaisante, ce final des
plus beau et, je le répète, à contre-courant,
ce lien parfait, vibrant et fantasmatique avec l'épisode
suivant, le scénario manque de profondeur, de tripes,
de puissance et même d'un peu plus de mysticisme.
Je comprends l'ambition de la production : ne pas refaire un
Star wars, façon "film de Jedi", intention
aussi logique que louable, mais le film proposé n'est
pas aussi solide que le reste de la saga. Et il se pose sur
un principe que j'ai eu beaucoup de mal à ne pas trouvé
vaseux : les raisons de la collaboration de Galen Erso avec
l'Empire... Mais ça n'engage que moi. Comparativement
parlant je n'ai pas retrouvé la complexité référentielle
issue du nouveau mythe qu'est devenu Star wars, mythe dont on
n'a pas encore exploré toutes les facettes près
de 40 ans après. Ici seule la mythologie guerrière
est exposée, classiquement, avec ses thèmes attendus
(héroïsme, courage, abnégation...etc). Fortement
déçu.
NOTE : 13-14 / 20