La première impression n'est pas forcément la
bonne et, pour une fois, ce petit film va plus loin qu'il n'y
parait. Pourtant nous avons là un monde forcément
dystopique où la société tend vers la perfection
absolue (pas de guerre, d'impolitesse...etc) façon Zardoz,
où l'avenir du peuple est plus ou moins choisi (Divergente),
où les héros sont jeunes (voir les dizaines d'adaptations
de romans pour jeunes adultes) et où l'on trouve diverses
traces de divers films (le monde imparfait en N&B, alors
parfait et en couleur -Pleasantville-
et même un clin d'oeil à Soleil
vert ou à L'âge
de cristal (on tue les plus vieux). Ca fait quand même
beaucoup de références à digérer...
et pourtant les apparences sont assez trompeuses : car le film
possède sa propre originalité, même s'il
se refuse à aller trop loin et se termine bien trop vite
: les séquences en noir et blanc, une vision plus poussée
et plus crédible que les récents "Hunger
games" et autres, un discours en profondeur sur le devoir
de transmission, le besoin de savoir qui on est et d'où
on vient. Alors si la critique de l'uniformisation n'est pas
nouvelle elle me parait bien abordée : l'absence d'émotion
(ici dûe à une drogue), de rêves, de douleur,
de malheur, de haine n'ont pour but essentiel moins le bonheur
du peuple que son contrôle absolu et l'éradication
de toutes les tares humaines, tant rêvée par les
extrêmistes de tout bord, ferait de l'espèce humaine
de simples et vulnérables animaux ; c'est toujours bon
de se l'entendre répéter... On pourra voir dans
ce héros qui découvre les émotions une
métaphore évidente sur l'hypersensibilité
(artistique sans doute), la recherche de la vérité
dans un monde qui garde les yeux fermés et un appel à
la résistance contre la dictature de la majorité,
le prêt à penser et la pensée unique. Bon,
certe, le film nous dit tout cela un peu naïvement (quoique
les meurtres de bébés me paraissent guère
relever de ce cas...), mais le mystère qui plane est
attrayant (bien que la fin, je le répète, soit
trop rapide et guère convaincante). Comme quoi c'est
bien dans de vieilles marmites (le fond, très 70's) que
l'on fait les meilleures soupes (sans jeu de mot), soit un film
qui évoque de manière réflexive la richesse
incroyable de l'homme, richesse contenue en un mot ("amour"),
émotion suprême qui entraine dans son sillon toutes
les autres ; y compris les plus viles... Mais la vie ne serait-elle
pas insensée sans cela ? Cette conscience n'est-elle
pas la différence majeure qui fait de nous des animaux
exceptionnels ??
NOTE : 13-14 / 20