Ca y est : les morts ont envahi l'Amérique. Romero,
Argento, M. Gornick et les Goblins répondent à
l'appel.
Un film aussi repoussant que défoulant ; le deuxième
tome de la trilogie est une critique absolument géniale
de notre société de consommation de masse (post-reaganienne
ici) et une analyse pointilleuse des comportements humains.
Les zombies ne se souviennent que d’une chose : ils se
rendaient au supermarché ! Ils n’ont d'ailleurs
plus qu’un réflexe : s'alimenter et s'alimenter
encore ! Violent comme ça n'est plus permis (une tête
qui explose, des gosses mitraillés...etc), c'est douloureux
(les chairs déchiquetées), l'ambiance est glauque
et ça sent la mort jusque dans le salon... et je ne vous
parle pas du gore quantifiable à l'hectolitre. La violence
y est également jouissive : la jouissance d'un joueur
de video game qui tue sans conséquence, juste pour le
plaisir morbide de sacrifier à l'interdit.
Bien sûr ces zombies-là représentent le
"Moi" social, socialisé, la globalisation (réthorique
de la trilogie où le fléau se répand) et
ils deviennent une société à part entière,
une espèce, faite de codes, d'un semblant de culture,
d'un mode d'alimentation... une espèce animal qui renvoit
l'homme à ces origines de par sa toute confiance en l'instinct,
sa peur du feu, son comportement primaire, son langage fait
de grognements, son existence portée par le besoin de
se nourir.... Et l'auteur en profite, en parallèle pour
tirer à boulets rouges sur les médias, la publicité,
l'argent, le mercantilisme...etc. Le groupe de "vivants"
n'en est pas moins intéressants : il représente
les rebelles au nouvel ordre établi, les résistants
qui, de toutes façons, légalement ou par le vol,
succomberont aux sirènes du paradis consumériste.
Et comme l'homme est un loup pour l'homme, c'est sous la menace,
non plus de zombies, mais d'autres "vivants" qu'ils
devront se battre ; un Romero plus pessimiste que jamais.
Le traitement de cette zombification évoque bien entendu
l'épidémie, celle que l'on ne peut enrayer sans
dégats, sans combats, la contamination amenant l'extermination
de l'humanité par... elle-même. L'auteur nous suggère
même une piste qu'il avait évoquer précédemment
: cette abomination est-elle le racisme ? Le flic raciste se
fait assassiner à la premier bobine et le noir, à
la fin, survit et part avec la femme blanche... En poursuivant
ces analyses un peu pompeuses mais dont on ne peut se passer
on pourrait, à l'infini, décoder de nombreuses
et superbes séquences du film : je pense notamment à
celle ou le magasin, soudain emplit de lumières et de
musique, semble vivre alors que les "clients" sont
morts ; où quand l'homme n'est plus homme lorsqu'il est
face à ces besoins, ou plutôt ces envies.
Finissons par cette phrase superbe, qui servit d'accroche publicitaire
au film, "Lorsqu'il n'y a plus de place en Enfer, les morts
reviennent sur Terre" : est-ce à dire que nous sommes
devenus si mauvais que l'Enfer ne puisse plus contenir nos âmes
? George en est apparemment persuadé...
Les seules réserves possible, à mon sens, sont
la mise en scène souvent pataude de Romero : pas assez
de mouvements dans ses scènes d'action, pourtant sauvées
par un découpage serré bien que parfois chaotique,
et une caméra intrusive. Et le look un peu trop gris
/ bleuté des macchabée, tout comme certains effets
vieillissants.
NOTE : 15-16 / 20