Une réalisation anguleuse et maîtrisée
à la perfection, véritable modèle du genre
et dont les cadrages nous hantent autant que le film lui-même.
De grandes envolées musicales héritées
des films d'épouvante de la décennie précédente
; il est d'ailleurs intéressant de noter que l'actrice
principale joue plus dans le registre de l'hystérique,
pas loin d'être catatonique, plus que celui de la scream
queen. Un Noir & Blanc qui, au-delà de sa somptueuse
beauté formelle, souligne parfaitement la symbolique
du film.
Sorti à la fin des années 60 -au même moment
que Dans la chaleur de la nuit"-, La
nuit des morts-vivants n'est pas à proprement
parlé qu'un film de zombies, même si Romero crée
tous les codes du film de zombie, encore en vigueur aujourd'hui,
et les explique de manière didactique et précise
afin de renforcer le réalisme de l'oeuvre. Ici les héros
ne sont autres que ce "couple" inter-ethnique qui
monopolise l'action, couple improbable pour l'époque
et couple prisonniers et à la merci d'une menace extérieure,
comme d'autres héros : ceux de Fort Alamo
ou Rio Bravo. De ce fait c'est avant toute
chose un film puissant sur la symbolique du racisme : la communauté
héberge un homme de couleur, et la menace contre laquelle
l'humanité doit lutter est tout autre.
Le film disserte sur une espèce inédite de folie
meurtrière (et raciste), improbable, "floue",
incontrôlable, folie allant à l'encontre d'un erzat
de société, avec toute la palette de ses représentations,
de ses relations. Et justement, c'est bien cette cohabitation
difficile qui se trouve être au centre de l'oeuvre ; ou
quand l'humanité finit par lutter entre elle plutôt
que de s'unir contre la véritable menace. Film O combien
brûlant d'actualité à l'heure où
l'on lutte contre de pseudo menaces migratoires quand les sociétés
capitaliste sont au bord d'une faillite sociétale interne.
On imagine alors le choc visuel que ce dû être pour
les spectateurs de l'époque, surtout lorsque les "tueurs"
dévorent de la chair humaine, en gros plan, face à
la caméra... non pas des zombies mais des "tueurs",
des être non-humains venus perturber le bon fonctonnement
d'une Amérique qui se croit propre sur elle et bien "vivante".
Romero conclue son oeuvre de façon affreusement défaitiste
: la lutte est perdue, l'innocence même est perdue ; en
ce sens la mort des parents est un moment terrible... A ce propos
le final est d'une puissance sans pareille.
NOTE : 17-18 / 20