Voici une formidable et inattendue fable politique digne d'être
la suite des "Origines",
d'une incroyable profondeur, c'est une étude clinique
très fouillée et très juste ; même
si le décorum est assez long à se mettre en place,
faute de trouver rapidement le bon rythme, de laisser au spectateur
cerner plus rapidement le sujet.
Pas d'ambiance apocalyptique
ici, on laisse ceci à une rapide introduction : le thème
est tout autre. Dans un monde qui panse ses blessures, deux
peuples antagonistes vont devoir essayer de vivre non loin de
l'autre, construisant une paix délicate à mettre
en place, très fragile. Pourquoi est-elle si délicate
? Parce que les forces en présence sont maintenant à
peu près de même puissance, mais surtout parce
que deux spectres "humains" vont refaire surface :
la peur de l'autre, de celui qui est différent de soit
et devient automatiquement suspicieux et menaçant, ainsi
que les vieilles rancoeurs du passé, à la fois
celles des hommes (les singes, le vecteur de la pandémie,
sont tenus pour responsable de la quasi extinction de l'espèce
humaine) et celle des singes (les hommes ont asservi les animaux
et les ont torturés, les considérant depuis toujours
comme inférieurs). De ce fait le moindre petit incident
prendra des proportions inquiétantes, chacun préférant
le repli sur soi, voir laissant la haine le submerger : c'est
tellement plus simple que de la contrôler.
Dans les deux
camps les artisans de la paix vont devoir faire face à
cette violence (et une scène rappellera forcément
le destin d'un homme tel que M. L. king), la voir ronger leurs
peuples respectifs et menacer dangereusement la stabilité.
Car derrière tout cela il y a d'ambitieux "politiciens",
tacticiens, opportunistes sans morale qui rêvent d'asseoir
leur domination, complotant pour obtenir le pouvoir coûte
que coûte, cherchant des boucs émissaires pour
mieux manipuler l'opinion, par le mensonge, et se maintenant
par la peur. Puis s'ensuit le temps de la résistance...
bien qu'ici il soit trop tard pour revenir en arrière,
le mal étant déjà fait et la machine de
guerre déjà lancée. Je parais en raconter
beaucoup sur le film, peut-être trop, mais cette lecture
m'est apparue tellement évidente et claire qu'il est
impossible que ce film très politisé ne le soit
pas intentionnellement. On pourrait au jour d'aujourd'hui rapprocher
ce brillantissime scénario de nombreux conflits passés
et présents, si bien qu'il en devient troublant...
Pourtant
il manque peu de chose à l'oeuvre pour atteindre la qualité
de l'original : j'ai souvent encensé M. Reeves, et je
reste parallèlement persuadé que la véritable
qualité d'un réalisateur se mesure à sa
façon de filmer les scènes les plus posées,
mais cette fois je n'ai pas vu un très grand Reeves,
trop fade pour porter les longueurs du scénario. Autre
qualité, presque évidente, celle de ces FX de
plus en plus invisibles, si proche du jeu des acteurs que le
voeu prononcé lors de la critique du premier opus s'est
à demi exaucé : Serkis apparaît enfin en
tête du générique de fin !!!
En tous les
cas voici l'une des sagas les plus riches du 7ème art.
NOTE : 15-16 / 20