Un film furieux, enragé et une nouvelle façon
d'aborder chacun des thèmes qui le traversent. Petit
point avant propos : rappelez-vous des super-héros qui
ont bercé votre enfance, mes super-héros, vos
super-héros ; des personnages auquels il était
très facile de s'identifier puisqu'ils possédaient
toute cette puissance qui nous faisait alors défaut.
Dans leur vie la victoire était forcément au bout
du chemin. Accessoirement ils étaient jeunes, beaux,
moraux, en parfaite santé, intelligents ; des idéaux
qui étaient venus remplacer les cowboys de nos parents,
ou de nos grand-parents. Le clin d'oeil du film à L'homme
des vallée perdus est très judicieux.
D'aucun disent que la mode des films super-héroïques
commencent à se tarir. Ce que la Fox a semble-t-il très
bien entendu et parfaitement compris. Il y a eu Deadpool
venant non seulement botter les fesses de nos héros
trop proprets, lisses, en ajoutant au métrage une violence
guère envisageable chez nos X-men et autres Avengers,
mais il se permettait, à travers son scénario,
d'en faire une critique scénaristiques dans les règles,
de leurs tics et de leurs petites manies. Ce point étant
fait, passons aux choses sérieuses.
Logan propose deux axes de réflexion
et renouvelle le genre de la plus brillante des façons,
ouvrant de tout nouveaux horizons. Nous sommes dans un monde
où, non seulement les X-men ont disparu, mais les mutants
sont une espèce en voix de disparition. La fin des mutants
? Presque. Les derniers d'entre eux ne sont plus que l'ombre
de leur gloire passée. Wolverine -renommé à
juste titre "Logan", puisque plus humain que jamais-
est un homme fatigué, blessé, vieillissant et
très porté sur la bouteille. Un travailleur qui
attend une paisible retraite. Le professeur Xavier est un personnage
en fin de vie : drogué, incontrôlable et toujours
plus impotent (la scène ou on doit l'aider pour pisser
est très symptomatique). Et pourtant les mutants ont
en quelque sorte de l'avenir : mais ce ne sont plus eux qui
le maîtrise. On en vient donc au deuxième axe de
l'oeuvre, cette relecture à la fois du thème des
enfants-soldats et de celui de l'enfant sauvage. Le premier
trouve ici, enfin, un traitement à la hauteur de sa suggestivité
(loin d'une Morgane,
dernièrement), et il faut avouer que la toute première
scène ou la fillette entre en action vous scotche à
votre fauteuil tant elle est pour ainsi dire chocante. Tant
de violence, le goût de la mort cachée derrière
une innocence de laboratoire, met vraiment mal à l'aise.
Et le film ne lâchera pas le morceau. la violence sera
partie intégrante de l'oeuvre (après tout ce sont
des combats à l'arme blanche !!!) et celle-ci, contrairement
à celle de son homologue Deadpool, n'est pas purement
graphique, apaisée par un petit clin d'oeil ou une blague
; c'est une violence pure, charnelle, excessive, bluffante et
étonnante (surtout lorsqu'elle provient des enfants,
ou leurs est assénés). La sensibilité qui
enveloppe le film la porte sur le devant de la scène
et la magnifie. Logan est une oeuvre scarifiée.
Rare sont les longs métrages made in Hollywood qui ont
obtenu carte blanche et vont vraiment au bout de leurs idées
; Logan est de celles-ci mais il ne s'arrête
pas en si bon chemin, à une violence de surface. Avec
notamment cette belle réflexion sur la mort et sur la
vieillesse. De même, et pour une fois, les petits clins
d'oeil aux comics ne sont pas du tout anodins : ces enfants
sauvages ne connaissent de la vie extérieure que ces
BD, brutales, irréelles, où la violence est une
norme, une banalité ; ces dessins contribuent à
les formater pour affronter ce monde avec toute la force nécessaire.
Une belle manière de démontrer que le film est
bien plus "réel" que ces pages originelles.
Martelé de scène en passe de devenir cultes, l'histoire
s'écoule jusqu'en une fin aussi attendue que parfaite
et lumineuse. N'oublions pas la scène centrale, définitivement
mémorable, immense moment de cinéma qui allie
surprise, déchaînement de violence et un combat
qui tient toutes ses promesses.
Et il y a également tout l'aspect technique du film :
Mangold livre un travail en tout point époustouflant
et une réalisation tout particulièrement crépusculaire.
Les couleurs monochromiques du film -hors mis sur la fin, libératrice-
sont tour à tour blafardes, maladives ou très
sombres. Une atmosphère palpable qui vous envoûte
et vous agrippe.
La plus parfaite des conclusions, avec une image de fin qui
n'est pas près de vous lâcher...
NOTE : 17-18 / 20