Un somptueux festin... un peu lourd à digérer.
Est-ce un semi-ratage ou un film presque expérimental
? La surenchère évidente (multiplication des décors,
augmentation sensible du nombre d’adversaires, démultiplication
des combats...) nuit-elle au propos ? Cette suite est-elle plus
commerciale que logique (Néo a de nouveaux pouvoirs)
? Ceux qui ont adhéré à ce Reloaded
évoqueront une oeuvre sexuée et osée,
des combats à pleurer de bonheur, toujours en apesanteur,
formidablement démentiels, titanesques et indémodables,
véritables balais aériens à la chorégraphie
hors normes. Ils ne manqueront pas non plus de parler de l'une
des plus intenses, longues -près de 1/4 d'heure !- poursuites
automobile de toute l'histoire du cinéma : grandiose
et invraisemblable, défiant, sublimant les lois de la
physique, filmée de façon complètement
hallucinée ; pourtant jamais gratuite, elle rejoint sur
ce plan le côté assumé très video
game de la trilogie -à la fois sur le principe et dans
la trame.
Approfondissant le message religieux de la saga, Reloaded
nous plonge dans Sion (En référence à la
ville des 3 religions monothéistes : Jérusalem),
ses prières, son élu, ses offrandes, sa Trinité...
et une scène de résurrection. Matrix
pousse toujours plus loin la réflexion sur la liberté
et la dépendance (aux machines, de manière plus
stricto sensus), à laquelle s'ajoute celle sur le libre
arbitre. Au travers de quelques dialogues posés comme
de véritable cours de philosophie, parfois un rien prétentieux
où sortis d’un peu nulle part, le scénario
se veut celui d’une véritable suite, avec un nouveau
sujet –le choix-, la découverte de la société
rebelle, de vrais révélations palpitantes et excitantes...
De plus il est agrémenté de très puissantes
scènes (celle abyssale de l’architecte, la «
petite mort »,...) et s'avère être finalement
un film hollywoodien complètement déroutant (sexe,
violence et philo) et en roue libre. Pour ne rien gâcher,
le mélange musical électro / classique y fait
merveille.
D’autres trouveront l’action toujours en équilibre
avec ce que le spectateur est près à avaler, n’adhèreront
pas à certaines séquences (celle avec les frenchies
: tordue, un peu poussive) et peut-être avec le reste
du film pour les mêmes raisons que ceux qui l’ont
adoré : son plus gros défaut étant qu’il
manque énormément de cohérence, étant
bourré de scènes vraiment intéressantes
en elles-mêmes qui, dans l’ensemble, ne s’intègrent
pas forcément très bien, ne trouvant pas toujours
leur place ; la fin abrupte n’est guère convaincante
et on trouve également, au début, des longueurs
absolument inutiles, bien que rattrapées par les futures
séquences d'action. Peut-être que, au-delà
de ses qualités esthétiques, on le trouvera plus
édulcoré ?
En tous les cas c’est une oeuvre puissante, un peu bâtarde,
entertaining, intelligente et décalée.
NOTE : 15-16 / 20