Avec Massacre à
la tronçonneuse ou La
dernière maison sur la gauche, voici le
nouveau chef-d’œuvre de l’horreur ultra-réaliste.
Un travail quasi documentaire, sans faille ni concession…
d’où le danger que paraît constituer une
telle œuvre pour les censeurs en tout genre. Mais la réalité
est autrement plus intéressante : il s’agit d’une
analyse précise de la folie humaine, une étude
in vivo de ces rebuts d'humanité, sans manière,
sans intelligence, sans goûts, vulgaires, sales, sans
morale, au passé traumatique, terreau de la folie et
de la psychopathie ; quel tueur aurait "besoin" de
prendre Henry pour modèle sans être au préalable
dément ? Quel dément aurait besoin d'un film pour
commettre ses actes odieux? Même si un encart nous laisse
espérer que nous sommes loin de la réalité,
les faits que nous présentent le film paraissent absolument
"authentiques", puisque qu'inspirés de la vie
de Henry Lee Lucas ; sans artifices, les agissements du tueur
nous sont exposés dans toute leur effroyable banalité,
avec une froideur que l'on est pas près de retrouver
au cinéma.
Henry, portrait of a serial killer est si cru
qu’il paraît indigeste, monstrueusement lancinant,
mais nécessaire pour nous en faire ressentir toute l’horreur
; c’est encore plus glauque et froid que Carne.
Les derniers mots du film, l’absence de jugements porté
aux actes du tueur (on nous laisse, pour ainsi dire, seul avec
notre morale), le jeu presque fade des acteurs, la lenteur introspective
de la caméra, la neutralité des angles, la pellicule
granuleuse, les couleurs glaçantes, les effets cliniques,
la musique qui vous plombe le moral ou la claustrophobie citadine
sont autant de détails qui prouvent aux incrédules
les qualités de cette œuvre extrême et d'une
rare puissance. Et ces meurtres dont on ne voit que l'atroce
résultat, la bande-son reconstituant l'horreur de la
scène, finissent par nous glacer les sangs avant que
l'on s'enfonce visuellement avec Henry dans des carnages parfois
difficiles à supporter. Le personnage est un cas d'école
: Henry est mû par des pulsions meurtrières, irrépréhensibles,
un besoin de tuer, et le film ne laissera aucune place à
l'espoir. Jamais.
Henry, portrait of a serial killer fait partie
de ses oeuvres dont on ne ressort jamais, qui nous hantent,
scène par scène, nous laissent un sentiment de
désespoir -sans rage ni haine-, de dégoût
; nous laissent dans un état second, une espèce
de dépression latente et incontrôlable. Terrifiante
réalité.
NOTE : 15-16 / 20