Voir Avatar et mourir... peut-être pas
quand même !
En tout les cas ce film fera date dans l'histoire du 7ème
art, comme annoncé par son auteur : si durant la période
du cinéma muet ce qu'il manquait aux films c'était
du son, durant la période du noir & blanc il leur
manquait de la couleur, et bien à ce cher cinéma
de notre enfance, il ne lui manquait plus (?) qu'une chose :
une véritable profondeur de champ ; Cameron l'a fait
! Et il n'utilise jamais sa technologie pour nous en foutre
gratuitement plein la vue, tel un jouet 3D, une démonstration
un peu froide : il fait son film comme si de rien n'était
et utilise la 3D comme un simple outil, au même titre
que... le son ou la couleur. D'ailleurs le procédé
sert autant les scènes "intimistes", en tout
les cas les dialogues, que les ébouriffantes scènes
d'action, notamment les poursuites et les combats.
Ce qui est étonnant dans ce film, c'est son démarrage
: la première scène est montée comme une
bande annonce et on est tout de suite dans l'action, comprenant
les tenants et les aboutissants du scénario à
venir. Immense fresque écologique qui emprunte à
diverses cultures, notamment japonaise (certains ont cité
Miyazaki) en ce qui concerne
l'arbre de vie (qui me rappelle par exemple Origine
; mais le thème est exactement celui de Mia
et le Migou !) et surtout les liens étroits qui unissent
les hommes et leur mère-nature, Cameron nous offre une
magnifique parabole. Celle de ces civilisations soit disant
avancées qui ont tant massacrées leur paire pour
mieux leurs voler leurs richesses, au détriment de toute
notion de préservation des cultures, de sauvegarde de
l'environnement. Sauf que ce film est de la pure SF et que,
lorsque l'homme dérape, la nature le rappelle à
l'ordre. Le scénariste-réalisateur nous propose
un véritable documentaire, un film ethnologique qui compte
bien nous embarquer à la découverte d'une culture
radicalement différente de la notre ; mais là
où G. Lucas ne faisait
qu'effleurer ces cultures extraterrestres (laissant l'univers
étendu de Star wars faire le reste), Cameron, en bon
anthropologue, disserte avec force de détails sur le
sujet : rite, religion, chant, tradition, langage...etc. Les
Na'vi, dont on peut douter du charisme à la vue des premières
images mais auxquels on s'attachera comme à n'importe
quel personnage, font en fait partie d'une nature omnipotente,
d'un entrelas qui est symbolisé par l'espèce de
cordon ombilical qui les relie aux animaux ou aux arbres. Tout
est là pour nous immerger et pousser cette étude
aussi loin est un pari assez osé de la part de Cameron
; et on ne manquera pas de croire dur comme fer à ces
paysages aussi monumentaux qu'exceptionnels. Idem pour la civilisation
impératrice et futuriste terrienne : la haute technologie
y est détaillée mais parait complètement
banale et c'est en celà que cet auteur est un génie
; notons par ailleurs le clin d'oeil évident à
Aliens (Les robots de combat personnels
!). Parmi les thèmes abordés, celui de la tolérance
me semble l'un des plus intéressants : n'oublions pas
que le personnages qui va devoir considérer le "peuple
de sauvages" est avant tout un handicapé dont on
se moque dès la première séquence... La
puissance du discours devient alors imparable !
Un mot sur la performance capture : Weta avait déjà
bien défriché le chemin avec son Golum, devenu
une référence ultime et historique en la matière,
cette fois encore c'est un véritable plaisir que de pouvoir
suivre le jeu des acteurs au travers de ses... avatars, dans
les moindres détails ; et je me permettrais même
une petite critique sur la réalisation de James Cameron
qui, à mon sens, n'utilise pas assez de close up (gros
plans) alors que c'est à ce niveau que l'on voit à
quel point ces visages sont absolument parfaits (mention spéciale
à celui de l'avatar de S. Weaver : un véritable
choc !). Et puisque nous sommes sur les défauts avérés
du film, notons celui-là, qui tient à la trame
: si le film est splendidement écrit et ne risque en
rien de générer l'ennui, force est de constater
que ce ne sera pas la surprise qui nous accrochera puisque tout
semble avoir été dit dans les bandes-annonces
et, pour le reste, aisément imaginable ; un peu dommage.
Avatar reste un film et une expérience
historique, à vivre absolument en 3D !!!!!
Deuxième vision : Bizarrement, lors d'une seconde
vision d'Avatar, les faiblesses scénaristiques s'effacent
au profit de ses forces ; ce sera la profondeur documentaire
du film qui émergera, la qualité et l'intelligence
dans le choix des codes et des rites du peuple Na'vi (le chasseur
remerciant l'animal qui a donné sa vie pour le nourir
-on trouve le même rituel chez les indiens Sioux-, le
passage à l'âge "adulte", c'est-à-dire
lorsqu'on devient un homme du peuple -l'Hanbleceya chez ces
mêmes Sioux-). On n'est moins géné par l'histoire
car on se rend compte que même en la connaissant on reste
captivé tant celle-ci est fluide, naturelle, universelle
et racontée de la plus brillante des façons ;
les aventures humaines et Na'vi s'imbriquent à la perfection.
Il restera également du film deux scènes à
mon sens inoubliables : l'un des premières apparitions
de Jake, lorsqu'il se réveille et sort de son "cocon",
et que l'on se rend compte, on voit pour la première
fois et on comprend de quoi est fait cette révolution
technique visuelle (aussi marquant que la première scène
de Star wars lorsque Vador et ses troupes investissent le Tantive
4) ; la seconde scène marquante est celle où les
Na'vi se défendent avec de pauvres arcs et des flèches
contre les armes de guerres ultra-perfectionnées des
hommes... tout un symbole.