La chasse reprend un thème qui semble
cher au réalisateur (Festen) mais le
traite d'une tout autre façon, plus frontal, abandonnant
la famille pour une collectivité. Le film prend son temps,
celui de se concentrer et présenter en profondeur les
personnages, d'immerger le spectateur dans ces vies, cet univers.
Le rythme peut paraître lent puisque le scénario
semble parler de chose si communes, mais l'approche du sujet,
du coeur du film, ôtera tous nos doutes : le piège
va se refermer sur cet homme qui pourrait être nous, ce
citoyen sans histoire, le piège des accusations infondées,
des bruits de rue qui enflent démesurément, des
"on-dit" qui se métamorphosent en vérité
publique, la diffamation se transformant en opprobe. Une oeuvre
à fleur de peau, effrayante, montrant l'enfance comme
on ne la verra jamais chez un Disney ; un film qui fait réellement
froid dans le dos, où l'innocence ne pèse plus
guère face à la peur collective de l'innommable,
face à la panique, la psychose qui se meut en chasse...
aux sorcières. Toute la puissance du film réside
dans la capacité du scénario à construire
ses personnages et, surtout, à disséquer une situation
à la fois hors du commun et tellement banale, à
étudier au plus près la haine, les a priori ;
La chasse est aussi une mise en garde dissimulée
contre les erreurs toutes humaines, les jugement hâtifs
et cette propension de juger autrui avant toute forme de justice,
laissant la colère parler avant la raison lorsque les
doutes se font sur un sujet trop brûlant. Une conclusion
des plus pessimiste achève de nous fondre à cette
oeuvre des plus intense : marquée au fer rouge, comme
son "héros". Le réalisateur a l'intelligence
de rester discret mais sait nous prendre à la gorge au
détour d'un plan (dans l'église notamment), travaillant
son sujet au corps.