Méandre serait-il une métaphore
de la vie ? Car l'on ne peut nier que le film va très
au-delà de ses "influences", totalement digérées
et exclusivement appropriées (on pense bien sûr
à Cube,
peut-être moins au fabuleux Eden
log).
Et il y a déjà beaucoup de choses dans cette toute
première scène, notamment l'expression d'un réalisateur
aussi inspiré que doué, au sens inné des
images, sachant instantanément plonger le spectateur
dans son oeuvre et le séduire d'emblée, au moyen
de quelques plans habiles. Et l'on y retrouve également
la thématique centrale de l'oeuvre...
Peut-être me suis-je trop approprié Méandre
? Mais j'y ai personnellement vu l'expression fantaisiste du
destin, de l'expérience de vie, avec des éléments
"physique" qui nous rappellent cette essence vitale
: l'eau, le feu, le sang, la chair et l'ombre perpétuelle
-ainsi que les représentations- de la mort. Toute l'oeuvre
est à l'image de notre existence humaine, à l'image
de l'existence de cette héroïne à qui la
vie n'a pas fait de cadeau, prête à en découdre
avec une dernière heure anticipée ; elle sera
ainsi constamment dirigée (les "portes" s'ouvrent
devant elle, ses choix sont restreints, elle se doit de trouver
le bon chemin,...etc), strictement minutée et son aventure
emplie de ses épreuves qui nous font grandir.
M. Turi ne tombe pas dans le piège du scénario-catalogue,
au gré d'un récit extrêmement serré,
jouant avec ses différentes pièces, relancant
toujours judicieusement notre intérêt et n'hésitant
pas à nous caresser à rebrousse-poil, à
nous surprendre régulièrement. Il réussit
son pari en nous interrogeant sans arrêt, donnant une
dimension métaphysique et essentielle à son histoire
afin de se démarquer. Dernière chose, mais non
des moindres : s'il a su rendre Méandre
définitivement mature c'est parce que l'on ressort du
film avec moult interrogations, de merveilleux doutes à
emporter avec nous après la projection, en vue de longues
causeries. Eviter de répondre à toutes les questions
posées par le scénario c'est assurer une longévité
intellectuelle à son oeuvre.
J'ai réellement eu l'impression qu'il y avait trois acteurs
qui parcouraient ces méandres : Gaia Weiss qui porte
le film physiquement, ce stress absolument omniprésent
dans chaque scène, ainsi que les décors qui ne
sentent jamais le "cheap" et dans lesquels on s'égare
avec un plaisir jamais contenu. Techniquement parlant, la photo
et le travail réfléchi et varié de M. Turi
sont de véritables régals pour les yeux, et ce
malgré les contraintes formelles.
Oppressant, déstabilisant, asphyxiant, Méandre
est un film d'horreur affirmé, couillu, énigmatique,
doté d'une très forte personnalité. Le
jeu avec le spectateur est parfaitement orchestré : peut
être lui reprocherais-je un dénouement attendu
? Mais en regard du véritable sujet du film, on ne peut
guère être plus logique et censé.
NOTE : 15-16 / 20