A peine six mois après le troublant, déconcertant
et d'autant plus génial Mother
! le cinéma américain frappe à
nouveau très fort et prouve, à qui veut bien l'entendre,
combien il peut être vivace, intelligent, atypique et
audacieux. Et ce sera tout d'abord grâce à un pitch
digne des plus grands films de SF qu'il va nous emmener loin,
très loin : un homme supposé mort depuis un an
réapparait chez lui au plus grand étonnemment
de son épouse. Et ce ne sont que les 5 premières
minutes d'un film qui part à cent à l'heure, vous
happe, vous surprend, vous secoue, vous excite, vous déstabilise
constamment au plus haut point. Un métrage qui a le génie
de nous sortir constamment de notre zone de confort, osant être
différent tout en restant "lisible" et grand
public (exit les séquences assez gore et les créatures
éminemment sauvages). Bienvenue dans un tout autre monde
où l'on va de surprise en surprise, de mutations étranges
en mutations étranges, de disfonctionnement en questionnements
; et où l'on finit par s'apercevoir que la-dite aventure
est sans aucun doute une odyssée métaphorique,
un voyage plus intérieur qu'extérieur. Et justement,
il s'agit d'un scénario d'une immense profondeur : il
se veut tout d'abord être un hommage aux femmes -ses héroïnes
blessées par la vie qui luttent pour survivre (et c'est
le coeur du film...) m'en sont témoins. Il est évident
de ce final WTF, sans explications notoires, devrait beaucoup
faire parler de lui, de par son rythme, véritable balai
organique somptueux, et de par ses répercutions inédites
; de quoi emmener le film avec vous, longtemps après
la séance, pour en discuter à loisir. Sans spoiler
ou influencer l'analyse de chacun (le réalisateur a déjà
donné quelques pistes dans une interview), j'y est vu
un "monde"
bouleversé par la séparation physique d'un couple,
par la maladie ou le malheur, la perte d'un être cher.
J'ai interprété cette danse final, non plus comme
un abandon -une espèce de suicide- mais comme le courage
de regarder son état psychologique en face et ne pas
se laisser aller ; les flashbacks me paraissent être des
éclairages allant tout à fait dans ce sens, et
l'espoir de ce retour un moteur à ce courage.
Annihilation est donc un oeuvre differente,
au design étonnant, beau, atypique, à l'ambiance
sonore épaisse, une mixtape entre
1er contact, un Apocalypse now
science fictionel et une oeuvre de D.
Aronofski. S'il pêche parfois par une réalisation
un rien monocorde, il a le mérite de vous secouer. Rare.
NOTE : 17-18 / 20