Zulu est le genre de projet dont a besoin
le cinéma français pour se légitimer auprès
d'un certain public de cinéphiles, voir d'acquéreurs
étrangers... et j'ai d'autant plus honte de ne l'avoir
vu en salles. Le film débute comme un polar lambda mais
avec un avantage certain : il est tenu par 2 acteurs que l'on
aurait pas forcément vu ensemble ; le sous-estimé
(si, si) O. Bloom, utilisé ici à sa "juste
valeur", et un F. Whitaker dont je ne tarirai jamais d'éloges.
Mais nous ne sommes pas non plus dans l'énième
épisode d'une vulgaire série TV : la tension sera
omniprésente tout au long de l'enquête, la violence
sera sous-jacente où carrément frontale et on
ne pourra y échapper. Et puis il y a une certaine façon
de raconter l'histoire, d'y inclure des personnages avec un
background d'une puissance ravageuse ; des traumas pesants et
des histoires d'amour complexes et bancales qui font de ses
flics des personnages hors normes. Comme si leur histoire collait
à ce pays blessé dans son âme, jamais vraiment
remis de ses blessures et où l'Histoire pèse encore
abominablement sur une société à moitié
ravagé par la pauvreté. On pourra toutefois regretter
que l'enquête soit un peu trop limpide et, surtout, qu'elle
paraisse s'arrêter en cour de route dans la mesure où
les spectateurs ont un temps d'avance sur la police. Fort heureusement
l'idée de cette nouvelle drogue, faisant passer la meth
de "Breaking bad" pour d'inoffensifs bonbons, pimente
le récit, récit qui nous tient tout de même
grâce à une réalisation en dentelle et un
peu à l'image générale de l'oeuvre : propre,
nette, efficace, sortant aisément du lot mais pas assez
pour toucher au génie d'un Seven, ni
même à celui du récent Prisonners.
Un film riche, un film fort, un film somptueusement noir.