La puissance politique de la SF des années 70 associée
au génie de Ray Bradbury.
Tout commence dans une caserne de pompiers où les hommes
du feu n'ont jamais aussi bien porté leur nom, dans une
première séquence marquante et éloquente.
Le pompiers sont devenus une véritable police des moeurs
: en voilà une terrifiante et double ironie.
Fahrenheit 451 est une œuvre très
proche du 1984
d’Orwell dans le déroulement de son intrigue et
dans la représentation méticuleuse d’une
société dictatoriale, depuis la description de
la manipulation économique, politique et sociologique,
jusque dans ses moindres symboles (l'architecture stalinienne,
le salut du parti, la délation institutionnalisée,
le consumérisme exacerbé...). La photo grisâtre
en accentue le propos. Ici on se focalise sur l’acculturisation
en tant que moyen littéralement esclavagiste : on y brûle
les livres et ce sont les pompiers qui ont pour mission d'y
mettre le feu. Empêcher la culture et le savoir de d'élever
et d'engendrer des citoyens de raison, réflexifs, critiques,
objectifs (surtout objectifs) et justes ; on génère
ainsi des gens obéissant et sans instruction, de parfaits
serviteurs qui écoutent mais ne doutent jamais de ce
qui parait acquis. Au sein de cette société on
y enseigne par coeur les mathématiques afin de formater
les esprits en de pures masses carthésiennes. Des citoyens
qui ne savent plus lire, abrutis d'écran et endoctrinés...
en 1953 !!
Notre héros est un agent gouvernemental, obéissant
mais absolument frustré, notamment sexuellement, un héros
dont la conscience s'éveille par le biais d'un message
clair : la solution, l'effondrement de pays absolutiste viendra
de ce sentiment d'amour retrouvé et de ce goût
de la liberté ; eux seuls pourront sauver cette société
pétrifiée.... Sentiments que l'on retrouve, mêlés,
dans des séquences surpuissantes : celle de la bibliothèque
clandestine ou lors de la lecture du livre -par le héros-
aux amies de sa femme ; et de l'étonnante révélation
sur les hommes-livres. On y trouve un Truffaut quelque peu différent,
devenant plus sophistiqué mais tout en restant collé
à son sujet. Et on reconnaît très bien et
au passage la patte de B. Herrmann.
Moins complexe et rigoureux que son illustre ainé, moins
noir mais tout aussi fort.
NOTE : 15-16 / 20