Le pari de la justice restaurative afin de changer les regards. Nos regards : en tant que spectateurs.
Je verrai toujours vos visages ne s'arrête pas à un scénario explicatif et quasi documentaire : aller chercher coupables et victimes, les confronter, confronter leur point de vue, leur vie respective, faire comprendre aux auteurs de délits violents ce qu'un crime implique ; pas seulement les conséquences personnelles, à savoir la prison, mais les conséquences pour l'être qui les subit. Au-delà du pardon.
La justice restaurative représente une solution à la récidive mais également à la réparation psychologique d'un crime : il s'agit de la confrontation positive de deux points de vue, de deux parties opposées, un aller-retour constant entre les deux, par immersion. Le film décortique, fait également découvrir cette association et son but : humain, positif, juste, intelligent et destiné à soigner les uns comme les autres. Destiné à se comprendre, comprendre deux mondes qui se sont entrechoqués à un moment pour des raisons que, bien souvent, l'autre ignore, ne comprend pas voir fantasme. Au-delà de son sujet passionnant, profond et original, puissant, émouvant, les acteurs nous ravagent, chacun d'entre eux est époustouflant, bouleversant, et chacun d'entre eux se dépassent dans son investissement (G. Lellouche en victime, Testot en ordure). Et je pèse mes mots.
D'une précision foudroyante, à travers quelques cas d'école significatifs, pas très loin du docu-fiction, le film nous raconte avec détails, pour les victimes des histoires terribles et terriblement banales en apparence, pour les coupables des récits désespérés et, surtout, irresponsables. C'est avant tout une oeuvre sur les rapports humains, rapports conflictuels et violents s'il en est, mais avec de part et d'autre des êtres blessés, chacun à leur manière, avec nombre de traumatismes dissimulés derrière chacun d'entre eux. A travers cet exemple le film n'est pas pour autant naïf : on comprend que cette "thérapie" ne peut fonctionner avec tout le monde... et avec toutes situations.
Je verrai toujours vos visages pose, in fine, une question essentielle, se demandant si les pires maux de la société ne seraient pas intrinsèquement dûs à un fait : l'incompréhension de l'autre, l'ignorance de l'autre, l'aveuglement et le manque d'empathie.
Une oeuvre utile, importante. Essentielle.
