Une question me brûlait les lèvres : est-ce que
cet homme du Nord allait être taillé dans le même
bois que les Vikings de la fabuleuse et exceptionnelle série
éponyme ? Sachant que les trailers laissaient amplement
imaginer une œuvre très similaire, depuis le thème
de la vengeance jusqu'en ses détails civilisationnels
très documentés, en passant par une violence gore
prononcée.
On se trouve -se retrouve même- très clairement
en terrain connu et reconnu : la culture, la religion et les
rituels, les batailles épiques, les butins de guerre,
l'esclavage, la culture du viol, les massacres systémiques,
la devineresse aveugle, le royaume d'Islande, le symbole du
corbeau, les sacrifices humains, l'utilisation des champignons,...etc.
Des balises, peut-être, mais qui avaient toutes été
explorées en profondeur dans l'oeuvre de M. Hirst, et
qui ne deviennent que des éléments de décors
dans The Northman.
Même s'il y appose sa patte inimitable, dans une photo
glaçante et renversante, donnant lieu à des images
pas loin d'être mystiques, c'est au gré d'un scénario
simple et rectiligne, sans un soubresaut, que Eggers propose
une œuvre tribale, réussie dans l'ensemble, mais
qui divisera. Car, pour ceux qui ont vu "Vikings",
on reste sur cette impression de voir un maigre condensé
de la série (89 épisodes !), pas même aussi
éclatant, pas aussi violent, pas aussi complexe, jamais
aussi précis.
The Northman reste cependant une odyssée
plus volontiers mythologique, hanté par les rêves
du héros, dont les images atteignent parfois le sublime,
mais à laquelle il manque un angle d'approche, une vision
plus novatrice (la vengeance est ici un but et non plus un thème)
et... l'immortel Ragnar. C'est quasiment à la toute fin,
poussé par son twist, que le film expose toute la cruauté
d'une existence mue par la haine vengeresque, par une vision
égocentrique et tronquée, aveuglée par
un souvenir d'enfant. Puissant.