Il y a d'emblée un hommage à T. Jones et l'assurance
de voir Terry Gilliam au générique : avec Adieu
les cons on sait parfaitement où l'on met les
pieds, Dupontel rendant hommage à ses héros de
toujours.
L'auteur n'a pas son pareil pour nous happer dès les
toutes premières images : sa réalisation est chirurgicale,
ingénieuse et signifiante ; on y retrouve autant la mise
en image fougueusement intelligente de Bernie
que la poésie baroque de Au revoir là-haut,
ou encore la nervosité de 9 mois ferme.
La photo rougeoyante et presque tape-à-l'oeil nous convainc
surtout d'une chose : ce sera une nouvelle oeuvre sanguine mais
à la sensibilité à fleur de peau. A commencer
par son lot de caractères qui possèdent à
eux seuls tout un univers de sensations, tantôt fous,
tantôt bouleversants, et une histoire qui fait la part
belle à ce fabuleux hasard, comme s'il était une
forme de poésie dans notre triste quotidien.
Pourtant le sarcistique Dupontel n'est pas en reste et il en
profite pour tirer à boulets rouges sur notre société
viciée et désintellectualisée (les cons
du titre), sur ses horribles travers dont l'égoïsme
et la misère sont les figures de prou : une critique
dans les règles, depuis la pollution insidieuse ("Mourir
d'un excès de permanente") jusqu'au drame des enfants
nés sous X, en passant par le jeunisme hideux et aberrant,
l'urbanisation galopante, les violences policières, le
sacro-saint internet (sans tomber dans la facilité) et
même les psychologues (M. Villermoz est à mourir
de rire) !
Adieu les cons s'avère être une
oeuvre hilarante sur la déshumanisation de notre monde,
et derrière cet humour surgit toujours une larme que
vous ne saurez retenir. Et la solution à ce mal-être
moderne parait être absolument radical : il ne peut y
avoir que l'amour. Ou la mort... Adieu les cons restera
le St Graal du film désenchanté, portant cependant
ses espoirs sur nos jeunes générations. Et tout
cela merveilleusement souligné par une guitare sèche.
Et on parle des acteurs ? Je donnerai illico le César
du meilleur second rôle à J. Berroyer, émouvant
à souhait. N. Marié interprète le pendant
Monty pythonesque du film, V. Efira sera symboliquement le personnage
tragique et poignant de ce drame ; et A. Dupontel s'offre le
rôle du protagoniste lucide, du clown triste coincé
dans l'engrenage de la vie.
Je ne peux achever cette courte analyse sans mentionner la réponse
apoliticienne de l'auteur au problème de l'intégration...
et je vous laisse la découvrir : la plus belle puntchline
du métrage.