Sujet épineux, scabreux et difficile à évoquer
au cinéma.
Et c'est pour contourner cet état de fait que la mise
en scène est effectuée avec imagination, le mélange
passé / présent étant un pont entre la
douleur d'un traumatisme et son traitement. Ça dynamise
le film et nous permet d'oublier le manque, parfois, de subtilité.
Les chatouilles conte le parcours d'une petite
fille abusée, puis d'une adulte qui ne sait pas gérer
ses problèmes de sexe, de relations à autrui,
qui ne sait plus aimer. Perdue. C'est aussi l'histoire, en parallèle,
de parents aveugles.
Le film est toujours en équilibre, mais très stable,
installant un malaise profond bien que le traitement soit faussement
léger, aussi cru qu'alimenté par un flow entraînant
et dansé. Un mélange incessant qui dénonce
la pédophilie par tous les moyens mis à sa disposition,
qui décrit avec force de détails la besogne du
prédateur, qui met en garde les parents contre l'absence
de doutes, aussi déplacés soient-ils ; puis contre
l'indifférence, le rejet. La honte. Un film qui nous
demande, les yeux dans les yeux : quel sorte de parents aurions-nous
été ?
Un film dur, réaliste derrière son format atypique,
un film qui fait littéralement froid dans le dos.
Mais c'est également une œuvre à visée
pédagogique : tout un chacun se devrait de le voir -à
l'école peut être-, afin de prévenir ce
genre d'ignominie intolérable. C'est un projet essentiel
qui aurait dû avoir un tout autre retentissement : envers
les victimes comme envers la justice française (la prescription
pour les bourreaux, pas pour les victimes : ni républicain,
ni démocrate ; une honte).
Des acteurs impeccables, voir hallucinants.