Une image, un texte, un symbole impudique : on pourrait discuter
à loisir de ces premières secondes qui semblent
vouloir faire définitivement basculer le film. Une simple
maladresse ? Non : le scénario ne s'en relèvera
pas, où plutôt se fera insistant durant près
de 2h10. Mais détruire entièrement ce film sur
ce simple fait -purement scénaristique- est tout aussi
réducteur de la part de la critique cannoise (2016) que
cette même idée. On y découvre un bel hommage
au travail phénoménal de Médecins du monde
dans les zones de guerre, l'envers du décor d'une ONG
; le travail d'êtres humains, de simples êtres humains.
C'est sans doute cela que le scénario veut démontrer,
dans le fond, et de façon aussi malhabile. Zimmer nous
propose une partition tout à fait magique et pleine d'inspiration.
Le montage y est assez ingénieux. S. Penn filme avec
justesse -et insistance- la misère guerrière africaine,
bien que le film se bornera à n'être qu'une succession
abjecte de violences extrêmes, choquantes, sur le film
rouge d'un voyeurisme un rien malsain. Sur fond de guerre nous
allons donc suivre un couple qui se lie, se délie, et
c'est bien ici que le bas blesse, que la morale se perd : comme
si la plus intense des misères humaines pouvaient en
rien se comparer avec les problèmes de coeur d'un couple
occidental, bien habillé, bien logé, bien entouré,
et ce, sans recul aucun depuis cette fumeuse scène post-générique...
Il y a ici une dichotomie vaporeuse, pitoyable, un ethno-centrisme
assumé et une immoralité redoutable. Il aurait
été tellement louable de démontrer à
nos pays bardés de richesses et de joie qu'ils ne sont,
comme le disait si justement et récemment un écrivain,
"un Paradis dans lesquels les gens pensent vivre en Enfer"
Des peuples aveuglés par leur propre bonheur et qui se
voile la face sur la véritable misère du monde.
Quand l'inhumanité occidentale est aussi inquiétante
que celle de ces fous de guerre... Vous avez dit "cynisme"
? Par sa maladresse le film n'élude en rien le coeur
du problème, à peine l'évoque-t-il de façon
presque banal : les restes lancinants d'une colonisation honteuse,
doublé par par des sociétés hypocrites
qui font la sourde oreille.