Un casting altmanien pour un univers lelouchien. Et un échec
public sans appel. Alors ma question, en dehors de tout parti
pris (et vous verrez qu'il n'y en a pas ici), est de savoir
comment un casting aussi rassembleur, un nom aussi prestigieux
derrière la caméra, un budget confortable et un
lancement dans les règles de l'art peut conduire à
un tel insuccès ; pour rester poli ?
Certe : je ne suis pas le seul en France dont le cinéma
de "papa" de C. Lelouch laisse, au mieux indifférent
-difficile d'imaginer aujourd'hui que le monsieur a attiré
des millions de spectateurs- ou pire agace. Mais il faut bien
avouer que ce film chorale où les destins se croisent
et se décroisent, jusqu'à l'hopital ou au tribunal,
en a laissé plus d'un sur le carreau. Pourquoi ? Parce
que cette série de scénettes ne nous parlent absolument
pas, certaines, aussi courtes soient-elles, n'en finissent pas,
d'autres encore n'aboutissent à rien. Et le film, censé
être au plus près de la vie, au plus proche de
l'humain, transforme nos vies... en récit de cinéma,
des vies imaginées qui ne sont, hélas, que banalités,
courts récits d'amour et de rupture sans âme, comédie
musicale fade, confrontation transparente avec une "star"
; des histoires qui ne nous touchent pas, déconnectées,
accompagnées de discours sur rien. Le film en est presque
déprimant, même si le scénario est vachement
bien agencé. Les fameuses scénettes n'apportent
même strictement rien à la conclusion. Ou si peu.
C'est une grande galerie de personnages, presque trop succinte,
et surtout réalisée de façon bien trop
carrée. Et l'humour n'a pas fait mouche : jusqu'à
devoir se raccrocher aux gags de J. M. Bigard (excellent dans
son rôle). Pour résumer mon sentiment je dirais
tout simplement que ce film cherche la justesse d'un ton sans
y parvenir : je préfère, et de loin, la verve
et le regard d'un R. Bezancon. Alors je crois que Mr Lelouch,
dont j'ai vu la quasi totalité de la filmographie, me
laisse définitivement froid, avec tout le respect artistique
que je lui dois en regard de sa carrière monumentale.
Et en regard au respect que je dois à ceux qui ont bossé
sur ce film, tout particulièrement toi, Jean... Que le
boulot de critique peut être cruel...