Rupture - Flashbacks. Ca commence par une rencontre originale,
vraie, et ça débouche sur la love story de Mr
Tout-le-monde, du moins le croit-on ; avec un couple de ciné
en parfaite symbiose et comme rarement on en voit sur grand
écran. Car ce film vous happe dès le départ
: il possède un ton propre, une puissante personnalité,
il impose sa propre façon de voir les choses et fait
de son héroïne déchue le centre de l'histoire
(il suffit de regarder comment sont filmés les dialogues).
A ce sujet, je n'avais pas vu V. Cassel aussi juste depuis fort
longtemps et E. Bercot n'a pas volé son prix à
Cannes. Voici une oeuvre qui désosse psychologiquement
ce que l'on a coutume d'appeler aujourd'hui l'amour "pervers-narcissique"
: une personne -généralement un homme- qui aime
sincèrement (un "je t'aime" trop rapidement
dit) et surtout se fait aimer de sa proie, trouvant ainsi l'une
des plus grandes faiblesses à exploiter, utilisant cet
amour pour parvenir à des fins les plus abjectes. C'est
un regard halluciné sur un couple, à peine croyable
parfois, pénétrant leur intimité sans pudeur
ni retenue, mais sans pour autant faire acte d'un voyeurisme
visuel -ici tout est, je le rappelle, pyschologique-, sur la
progressive destruction mentale d'un être humain par son
double aimant. Relation perverse lentement mise en place et
reposant entièrement sur cette fascination, alors que
l'être cher est pourtant capable de toutes les bassesses
et d'un nombrilisme les plus extrême. Piège inéluctable
d'un amour sincère, douce descente aux enfers décrite
avec force de détails, de précision et d'intelligence,
évitant à tout prix et le tape-à-l'oeil
et le déjà-vu, ne caricaturant jamais les situations
énoncées. En fait tout passe par des dialogues
formidablement bien écrits, tout effort de manipulation
est accompagné de paroles déstabilisantes, comme
des couperets que le bourreau choisit et déclame avec
force. Une oeuvre à part, formidablement documentée,
qui confirme l'immense talent de sa réalisatrice.