Les huit salopards ou le western selon Quentin
Tarantino. Tout est là : les longues pages de dialogues
taillés dans la roche, bien volontiers vulgaires, les
personnages tarantinesques campés par des acteurs dont
on ressent le plaisir à les interpréter par delà
l'écran, la violence toute en excès (très
italienne, pour les amateurs de films des années 70-80),
quelques chansons bien trempées et, cette fois, la partition
impeccable d'Ennio Moricone. Mais ce n'est pas tout. Car Tarantino
est un conteur d'histoire : par le biais de chapitres le monsieur
prend son temps, le scénario s'étire à
volonté ; la présentation des 8 personnages, de
la situation, des lieux (le film tient beaucoup du huit clos)
est sans doute un peu trop didactique -impression du moment-
car elle tient sur environ une heure. Puis l'intrigue trouve
sa place, genre "Agatha Christie au Far West", s'épaississant
et nous excitant un peu plus au fil des minutes -qui pour le
coup passent bien trop vite maintenant- et un semblant d'enquête,
via un montage achronologique surprenant, va nous transporter
jusqu'au fin mot. Rien de bien exceptionnel mais tout de même...
Pourtant le meilleur du film restera pour moi la réalisation
extrêmement pointilleuse du maître, réellement
virtuose, et rien que pour cela je suis prêt à
revivre les 2h45 de film, régal absolument pour les yeux,
faisant de ce quasi huit clos un film en constant mouvement
ou la caméra prend part au récit, bien au-delà
d'un esthétisme léché. Passé la
première impression, le film prend son envol, Tarantino
s'appuie sur quelques références, son scénario
évoluant du "gimmick" (la rencontre des divers
personnages, leur présentation un peu rébarbative...
et la scène délirante de la porte !) à
celui bien plus abouti d'un western qui n'a rien de bien classique,
sur fond de racisme d'époque, très personnel,
presque théatral, où plane l'ombre de nombreuses
oeuvres. Un grand cru imparfait.