Ce film de Capra est, pour un idéaliste tel que moi,
un chef-d’œuvre cinématographique et le plus
formidable de tous les antidépresseurs. En substance
quel est son message ? Crier au genre humain que chacun de nous
n'a qu'une seule vie et que l'on ferait mieux d'en profiter
par tous les moyens, mais en effectuant les bons choix, plutôt
que de penser à cet argent qui ne lui sert qu’à
nous éloigner de toute tranquilité ; gérer
son existence comme on l’entend, aussi farfelue soit-elle,
être soit-même, en phase avec soit-même, et
être libre une bonne fois pour toutes.
Capra ne pense qu’au bonheur du spectateur, le faire rire,
lui offrir une jolie palette d’acteurs, des dialogues
ciselés afin le détendre autant que celui-ci peut
l’être, le laisser rêver à une existence
parfaite, si possible sur cette terre ; bien sur la folie ambiante
nous dépasse parfois un peu dans cette maison de liberté
(dans le sens d’une exagération) où tous
ces braves gens ne sont riches que de joie et se contentent
de peu (la vente des pétards, masques et autres artifices,
générant sans doute un salaire… maigre ?)
afin de payer le loyer. On se plait à supposer qu’ils
parviennent à vivre convenablement dans l’absolu
puisqu’ils ne déclarent rien au fisc et paraissent
ne pas trop avoir de problème d’argent… hors
mis pour l’amende ; certe, c’est confus mais on
s’en fout ! En tous les cas cette Famille Adams du bonheur
nous fait croire dur comme fer que l’on peut briser nos
chaines, celle du cercle vicieux travail / argent : si on travaille
plus on a forcément plus d'argent, mais on augmente nos
besoins non essentiels, alors il nous faut travailler encore
plus pour les satisfaire… jusqu’à l’aliénation.
Mieux vaut choisir notre existence, vivre pour nous-même,
avec nos désirs et nos passions, sans souci d'une quelconque
solvabilité dans ce monde capitaliste.
En voici une charmante façon de dénoncer de façon
légère notre monde captaliste, industrialo-consumériste,
qui génère de la pauvreté et du malheur
; déjà en 1938 !!! J'imagine qu'à sa sortie
cet OVNI, au vue de la production de l'époque, a fait
l'effet d'une bombe (voir sa pléthore d'Oscar). Ce scénario
est une vériatble ôde à la liberté,
à la jouissance de l'existence : celle-ci est courte
et on imagine aisément que c'est ce qui fait avancer
cet honorable grand-père qui a perdu sa femme bien trop
tôt. C'est tout un mélange à la fois naïf,
utopique, fou, différent, poétique, frais, anarchiste,
doux, non-conventionnel, anti-bourgeois. U choc des mondes (riches
/ pauvres), des cultures (apparats / simplicité) et des
morales (sans valeur / valeurs familiales) qui se conclue non
pas par un beau dialogue un peu vain, mais à la fois
par une tragédie et un simple... morceau de musique ;
celui-ci permet au riche idiot san coeur de basculer et comprendre
la vie.
Tout ceci est à la fois charmant, drôle et gentillement
révolté. Le film ne propose pas de révolution
mais une évolution qui est toujours valable... 80 ans
plus tard !!! Il trouve même de nos jours de sacrés
correspondances : l'accueil à bras ouverts d'inconnus,
d'étrangers ; cette lutte tacite entre le citoyen et
l'Etat, la vision de l'imposition, la peur et son exploitation
commercial ou politique....etc. Alors prenons la vie du bon
côté : le bonheur sera toujours plus puissant et
facile à atteindre que la richesse.