Avec The search M. Hazanavicius n'a pas choisi
la facilité : c'est tout à son honneur et grand
bien lui en a pris ; même si le verdict des salles fut
tout autre. Les spectateurs n'ont pas toujours raison, loin
s'en faut. Qu'il était ambitieux de vouloir traiter un
tel sujet : lointain (qui sait exactement où se trouve
la Tchétchénie ???), oublié (il y a encore
des centaines de morts chaque année !!!!!) voir méconnu
du grand public, très politisé et qui plus est
avec moult sous-titrages. Pourtant The search
est ce que le cinéma français a fait de mieux
en 2014. Techniquement parlant il n'y a rien à redire
: une photo vraiment somptueuse, quasiment monochrome mais laissant
pointer quelques vagues de rouge ou de bleu (les couleurs du
drapeau russe : un hasard ???) ; et un jeune acteur qui m'a
littéralement sidéré. Un scénario
qui va a l'essentiel, évitant le pathos et en restant
au fait, extrêmement réaliste ; 3 histoires de
guerre entrelacées (une tchétchène, une
française et une russe), bouleversantes, très
émouvantes et tout autant engagées visant à
nous montrer à la fois l'inhumanité de l'humanité
(le camp russe, les conséquences sur les civiles), son
humanité (les gens qui s'engagent pour aider les populations
violentées) et à répondre à une
question essentielle que nombre de film de guerre évite
inlassablement afin de rester aussi impartiaux que manichéens
: Qui sont les salauds d'en face et pourquoi sont-ils comme
ça ? Et le film devient une perle rare lorsque l'on s'aperçoit
de l'ingéniosité de ce récit et de la réponse
sous-entendue par celui-ci : une attaque en règle contre
le président Eltsine et son 1er ministre (Poutine...),
et non pas contre les russes, un cri pour ne pas oublier ses
massacres, ses exactions, la situation proprement inqualifiable
de ces enfants en temps de guerre, évènements
qui ont tôt fait de quitter les mémoires, de sombrer
dans l'oubli... parce que la Tchétchénie c'est
loin, parce que cela a commencé il y a longtemps et parce
que l'Europe de l'Ouest n'a peut-être pas de grands liens
culturels avec ces... êtres humains ? Qu'importe qu'ils
soient musulmans, chinois, noirs ou pauvres : ce sont nos frères
et il me semble que l'histoire se répète éternellement,
que l'homme n'en retienne jamais des leçons et qu'il
faille faire quelque chose pour (r) éveiller nos consciences
citoyennes ; et puis voilà comment on fabrique des terroristes
que l'on trouvera peut-être demain à commettre
les mêmes genres d'horreur... M. Hazanavicius réalise
ici un pamphlet politique aussi intelligent (la façon
dont la russie "fabrique" des soldats, des tueurs
sans âme), brillant que parfaitement maîtrisé,
d'une rare puissance émotionnelle : il faut croire que
ce genre d'histoire trop sérieuse est moins plébiscité
par les spectateurs que l'histoire d'Hollywood... Salaud de
Poutine !