Mommy n'a pas usurpé la réputation
de son réalisateur : un esthète incroyable qui,
l'air de rien nous balance son film, ses personnages en pleine
gueule. Le format 1:1 y aidant beaucoup -même si ce n'est
pas sa raison essentielle d'être-, étouffé
que nous sommes par ces visages, ces corps, ces vies... misérables.
Les images, derrière la première et fausse impression
de vulgaires photos tenues par une caméra à l'épaule,
sont tout simplement magiques, on a vraiment du mal à
savoir par quel procédé -il y en a, en fait, une
multitude variant en fonction des sujets filmés- ce diable
de réalisateur parvient méthodiquement à
transmettre autant de choses, qui plus est avec une aussi petite
image, à capter avec autant de justesse toutes les émotions
qui transpire sur l'écran, de l'amour à la violence
en passant par l'humour. On s'éloigne rarement de ce
"couple", de ce trio atypique, des petites gens coincés
dans leur (cadre) pauvreté, leur maladie, leur mal-être,
l'étroitesse de leur (cadre) vie et de leur avenir :
et c'est justement quand l'espoir survient que Dolan choisit
d'ouvrir le champ des perspectives, accompagnant son geste d'un
plein écran libérateur. Il s'enchaine dans ce
film des scènes absolument bouleversantes (celle du rêve
me hantera longtemps, la dernière scène avec le
trio également), soulignées de musique soigneusement
choisie et magnifiée par des acteurs dont la performance
est sans doute ce que j'ai vu de mieux cette année. Je
ne partais pas conquis, j'en reviens étonné et
absolument ravis.