Le film le plus sincère jamais réalisé
sur la banlieue. En plus de me replonger dans mes années
cité, ce film est brûlant d'actualité :
c'est bien simple, il aurait très bien avoir été
tourné hier. Aujourd'hui encore des jeunes perdent la
vie lors d'un interrogatoire où semblent être passible
de la peine de mort pour s'être soustraie à un
simple contrôle de police ; bien souvent par peur d'une
peine supérieure à celle d'un autre citoyen, plus
blanc, plus "français", habitant des quartiers
plus "respectables".
Deuxième film de l'auteur, La haine
fait preuve d'une maîtrise et d'une éloquence peu
commune dans sa réalisation : le talent éblouissant
et presque indécent d'un artiste implacable et intègre.
Un travail d'une richesse, d'une variété immense,
jouissant d'une composition de plans qui atteint le sublime.
La haine est une chronique multiculturelle
(un feuj, un rebeu et un renoi) sur les rapports tendus avec
l'autorité. Analyse méthodique d'une spirale de
violence, le mécanisme d'une vengeance non plus inexorable
mais provoquée. Le film démonte un système
à bout de souffle concernant l'intégration : depuis
des conditions de vie minables jusqu'au racisme de moins en
moins latent, une jeunesse désœuvrée qui
paie les pots cassés d'une politique de ghettoïsation
et qui finit par dépasser les bornes face à des
forces de l'ordre dépassées. Combien d'incidents
la société supportera-t-elle ? Combien de gens
désabusés poussera-t-elle aux exactions, de part
ses inactions ?
Il y a enfin une symbolique forte : celle de cette banlieue
qui se rend dans les beaux quartiers, qui tente de passer la
frontière invisible de la bonne société
mais qui se rend compte que son intégration semble toujours
impossible, se heurtant à la même violence.
Chronique accablante et hyper tendue dans un noir et blanc sublime,
parsemée de moments cultes, de dialogues taillés
au rasoir et d'un trio d'acteurs parfaits de bout en bout.
La société française n'a assurément
pas encore atterri. Mais elle poursuit sa chute... Jusqu'ici
tout va bien...