Bon comme les souvenirs : Deux millions de français sont allés voir un
film nostalgique… et ce n’en est pas un ! Non… ou durant une petite minute seulement
; cette vision me semble définitivement trop restrictive.
Après avoir vécu la Grande Guerre, un homme trouve son paradis dans un petit coin des marais où il vit le plus simplement du monde avec un ami. Les personnages du
film vivent hors de la société et ils pourraient
exister aujourd’hui (cf. Box of moonlight),
ce sont des libertaires, des anarchistes pacifiques et naturalistes,
intemporels, qui jouissent de la vie au quotidien et ont compris
que le travail est esclavagiste si son but unique n’est
que de faire vivre et seulement faire vivre. Travailler pour vivre et non le contraire : nos héros ont l’intelligence
d’utiliser la société sans se laisser utiliser et user par elle. L'image du bourgeois qui paraît / pourrait représenter l’anti-thèse du
"marais" est en réalité l'un de ses enfants : aucune nostalgie là-dedans, pas un regret seulement de doux souvenirs qui aident la vieille dame à porter sa vie quotidienne.
A la fin, la vieille dame regrette moins son passé, en
tant que "passé", qu’une certaine
idéologie qui est moins répandue dans ses vieux jours, de celle que
l’on a du mal à maintenir où à redécouvrir.
Une fois dépassé ces considérations, ce film est un véritable
bonheur d’environ 1h55, joyeux de bout en bout, hilarant,
anti-dramatique (le destin de la petite fille ou du boxeur),
nature.
Les enfants du marais est donc un immense film, parce qu'il est éclatant visuellement, lumineux et même ensoleillé ; un écrin photographique exceptionnel. Parce qu'il nous présente une galerie de portraits campée par d'immenses acteurs. Parce que les dialogues pétillent dans les oreilles comme de douces et petites vérités. Parce que son scénario est d'une richesse rare, jamais moralisateur, simplement pur comme une puissante réflexion sur le bonheur et la richesse. Le film nous présente des héros qui vivent de peu, qui vivent librement et qui vivent heureux : des clochards célestes avant l'heure, plongés dans la nature, bons vivants ou philosophes à leurs heures. Une œuvre simple sur les choses simples de la vie. Clamons- le haut
et fort : Les enfants du marais est un petit chef-d’œuvre !
J'ai pourtant et tout d'abord reproché au réalisateur de ne pas y mettre les formes, sa
distance, son manque d’engouement me gênant aux entournures. C’est en réalité
un film hawkien dont on peut penser qu’une forte personnalité
aux commandes aurait tuer, par trop indigeste. Alors contentons nous
d’étudier les cadres.