Nous immergeant dans un pays (la Chine) et une période
que nous maîtrisons assez mal généralement
(la fin de la seconde guerre mondiale dans cette région),
Spielberg nous propose, au-delà de l'originalité
du sujet et du décor, un regard inédit sur le
déclin de l'Angleterre colonialiste, poussée hors
des frontières par des problématiques guerrières
qu'ils ne maîtrisent absolument pas. Un aspect enrichissant
et original de cette guerre et de l'histoire de ce pays à
travers le regard presque allégorique d'un enfant : premier
grand rôle ciné pour le génial Christian
Bale, qui fait ici déjà montre de tous ses incroyables
talents, avec un naturel éloquent.
L'empire du soleil narre l'histoire de ce
jeune enfant pris dans cette tourmente guerrière (l'envahissement
de Shanghaï par le Japon, puis la libération par
les américains), un riche et insouciant anglais féru
d'aviation qui découvre soudain l'extrême pauvreté,
la faim, la solitude, l'absence de liberté et la disgrâce
d'un peuple opprimé. Au-delà de son aspect politico-historique,
c'est une chronique de la perte de l'innocence, de la violente
entrée dans l'âge adulte, l'âge des responsabilités,
cet âge où l'on est forcé de regarder la
réalité en face, sans le filtre de l'enfance.
Avec un message sous-jacent à l'égard de ses générations
d'enfants post-50's ayant eu la chance de ne pas connaître
la guerre : où comment leur rappeler de relativiser leurs
petits malheurs, de profiter de cette vie de paix.
Visuellement parfaitement maîtrisé, avec ça
et là quelques plans à la beauté radieuse
(les jeux d'ombres, les compositions audacieuses) le film trouve
son également équilibre dans une certaine forme
d'objectivité, refusant de faire de ses personnages des
créatures manichéennes et idiotes.
Dieu que la guerre est absurde.