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Easy rider
Budget = 0,360 M$
BOX OFFICE France = - / ? - ? - 1 839 000 entrées
BOX OFFICE USA = 0,040 / 41,7 M$
BOX OFFICE Monde = 60,0 M$
 

A décréter une oeuvre cinématographique et son auteur "visionnaire", trop vite, trop tôt et souvent sans grands arguments, on déprécie la force et la portée même de ce mot. Mais 50 ans après sa sortie, Easy rider est non seulement culte, bien vivant, moderne, mais également visionnaire. Et il est selon moi l'un des 10 plus grands films de tous les temps.
Il faut d'abord jeter un regard en avant sur ces 2 personnages, Billy le farfelu et Wyatt l'intellectuel, dit "Captain America", clin d'oeil autant à la pop culture qu'une façon de secouer l'arbre de la fierté nationale légendaire outre-Atlantique. On ne saura que très peu de choses sur eux finalement : ils disent n'avoir qu'une semaine pour faire leur voyage, on imagine que si celui-ci échoue ils vont devoir rentrer dans le rang d'une société qui leur a octroyé une semaine de congés ? Billy est un hippy, drogué qui n'a qu'une seule chose en tête : profiter de la vie quoiqu'il arrive ; en clair s'envoyer en l'air de toutes les façons possibles et imaginables, drogue et sexe, comme pour oublier une existence terne. Ces deux là n'ont pas l'air de véritables dealers, contrairement à ce que l'on pourrait croire au tout début, mais plutôt de deux gars qui veulent profiter une dernière fois du système pervers de cette société mercantile pour s'enrichir et laisser leur existence couler comme bon leur semble. En Floride.
Wyatt est plus subtile, plus sensible, plus sensé : tête pensante du duo, il est celui qui amène toute la réflexion -sur laquelle on reviendra- du film, l'espoir ("Ils y arriveront"), la critique sociétale et même personnelle ("On s'est paumé"). Le duo sera vite complété par le personnage hilarant -mais pas seulement- de Georges. Wyatt se dévoile un peu plus lors de la fabuleuse et planante scène de trip, où il évoque ce Dieu auquel il croyait et auquel il aimerait tant croire, croyant avoir été abandonné, mais aussi ses parents dont il parait être orphelin de père et dont les relations avec sa mère ne sont pas... enrichissantes.
Film idéaliste mais très moderne où nos anti-héros vont traverser l'Amérique de leurs ancêtres en partant depuis la côté Ouest -le film est provocateur jusque dans son âme- pour rejoindre l'Est et faire ainsi le parcours inverse des premiers colons. Et sur ce chemin ils vont croiser deux visions de leur pays chéri : d'un côté l'homme de la terre, fier paysan qui procrée et enrichit le pays avec ses enfants, mais également la communauté hippie qui tente de faire exister une nouvelle société, centrée sur les artistes, en se nourrissant de la terre et revenir ainsi aux racines de l'Amérique. De l'autre côté il y a l'Amérique raciste, blanche, sudiste, hideuse, avec les redneck mais également les symboles autoritaristes que sont ici les policiers. On ne verra aucun enfant dans ce monde là. Près de 50 ans plus tard la population n'a clairement pas changé et le message du film n'a pas été entendu, ou a été oublié : l'Amérique blanche de Trump fait front avec ces nouveaux américains -un temps symbolisés par B. Sanders- qui souhaitent se lancer dans une nouvelle société, plus écologique, plus juste et surtout plus libre. Un retour aux fondements de l'Amérique.
Le personnage de Georges apporte par ailleurs sa pierre à l'édifice. Il y a bien sûr son aspect de surface, comique formidable où une seule de ses scènes vaut toute la filmographie de Boon. Mais il ne faudrait pas oublier cette séquence charnière, explicative, où il confie à Billy que la haine de ses concitoyens provient de leur peur -et les américains du 21ème siècle sont toujours gouvernés par la peur-, peur de la personnalisation du changement que sont ces deux hommes, d'une liberté qu'ils ne peuvent, eux, américains moyens du Sud, pas atteindre et qui les effraie tout autant.
Notons que le film trouve sa pierre d'achoppement lors de la scène, hautement symbolique, de trip dans le cimetierre : ici sont confrontés le sexe et la mort, Eros et Thanatos, la religiosité et le doute païen, la double perte du "père", biologique et spirituel, et surtout la prise de conscience tardive de Wyatt. En se vouant au plaisirs terrestres et vains, dans lesquels ils ne semblent d'ailleurs jamais vraiment se plonger, ils se sont tout deux égarés. La terrible conclusion, hautement pessimiste du film, où nos héros idéalistes sont rattrapés par l'Amérique régressive -et le message est d'autant plus douloureux en 2017-, trouve un bel écho dans le sublime plan final dont nous allons reparler ci-dessous.
Et puis il y a, enfin, tout l'aspect visuel extrêmement riche du film. Car Easy rider est tout autant une oeuvre réflexive que formelle, et les deux s'enchevètrent de la plus intelligente des manières. Si on trouvera quelques maladresses, aujourd'hui parties intégrantes de l'oeuvre et de sa légende, de son charme intemporel, il est difficile de résister à ces enchaînements entre scènes, comme une invitation au voyage, difficile de céder au bonheur devant cette subtile juxtaposition de plans dans le cimetierre ; difficile de ne pas comprendre le symbolisme génial lorsque les deux motards réparent leur roue aux côtés de deux fermiers qui scellent leur cheval. Et, pour y revenir, alors que ce film se joue toujours à niveau d'homme, au niveau de la route, comment ne pas comprendre ce dernier plan où la caméra daigne enfin s'élever dans les cieux juste après l'accident ??
Easy rider et son cortège de scènes planantes (non simulées !), sa bande son cultissime et loin d'une bande originale "jukebox" car formidablement bien choisie (il suffit d'écouter les paroles des chansons en présence pour entendre penser l'auteur), Easy rider est une oeuvre indémodable qui serait juste de présenter comme avant-gardiste et surtout ne jamais, jamais oublier...
L'un des 5 plus grands et plus importants films de l'histoire du cinéma

La critique des internautes
 

 

NOTE : -/20

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