Chronique caniculaire d'un quartier multiculturel new yorkais
-Brooklyn- où Spike exerce son immense talent de metteur
en scène de manière expressive (plans obliques,
personnages placés devant de grandes fenêtres qui
ouvrent sur le quartier). Ne cherchez pas d'intrigues dans ce
monde coloré : elle viendra tardivement.
Inondé de dialogues, de bruits, de chaleur, de musique,
Do the right thing est une ôde au pluralisme
culturel et aux gens, mais sans ne jamais être consensuel
: le film évoquant également cet espèce
de racisme latent et multiracial, arguant de façon décomplexée
que tout un chacun, sans distinguo de couleur ou d'origine,
est égal devant la bêtise des mots. Des petites
phrases censées crever les abcès du quotidien,
de petits antagonismes inconséquents qui déboucheront
sur une grande haine explosive. De petites tensions en coups
de gueule, de grands coups de gueule jusqu'au drame, une vaste
galerie de personnages défile devant nos yeux en laissant
opérer une véritable magie immersive, comme si
l'on devenait peu à peu résident de Brooklyn.
Furieusement indépendant, Lee explore déjà
ses thèmes de prédilection (les tensions raciales,
les violences policières, la place de la communauté
noire américaine...) et décortique avec précision
et intelligence la douce montée d'une émeute,
souvent causée de rien, mais conduisant en une terrible
théorie des dominos... Ou comment l'un des protagonistes
causera sa propre perte en usant de vengeance, mordant jusqu'à
la main qui le nourrit : la conclusion sur les paroles de Martin
Luther King et Malcolm X laisse planer sur l'oeuvre et son auteur
un doux parfum d'ambiguité et de souffre...