Il est des séances de cinéma qui compte plus
que d'autres : celle de The doors en fait assurément
et pleinement partie. Je me dois tout d'abord d'informer mon
lectorat du lien qui me lie avec James Douglas Morrison : Pour
avoir tout écouté du groupe, jusqu'aux derniers
enregistrements de poèmes mis en musique, pour connaître
chacune de ses chansons sur le bout des doigts, pour avoir tout
lu à son propos (les divers biographies et les recueils
de poèmes dont je recommande vivement "Une prière
américaine"). Et parce que, je dois vous l'avouer
ici, durant mes années lycée mes amis m'avaient
donné le surnom de "Jim" à cause de
mon admiration pour ce chanteur. J'ai même par la suite
prénommé mon premier enfant Jimmy. Pour vous situer...
The Doors : la naissance d'une icône
comme il n'en existe plus. Car qui, aujourd'hui, parmi ses stars
en papier mouchoir pourra se targuer d'exister encore dans 50-60
ans, au-delà de ses chansons (et encore...) ??
The doors retranscrit à la perfection
une époque bien au-delà de son simple decorum,
son atmosphère 60's fantasmagorique, hippy et post-beatnick
; depuis la musique jusqu'à cet ambiance fascinante et
délicate à mettre en image sans tomber lourdement
dans les clichés les plus galvaudés. Toutes les
caractéristiques d'une génération amenée
à bouleverser le monde, un instant, à travers
une musique plus électronique, une mode vestimentaire
tranchant violemment avec celle de leurs aînés,
l'usage abusif de drogues en tout genre et un esprit de liberté
; libertaire mais apolitique.
The doors, plus que l'histoire
stricto sensus du groupe, est avant tout un incroyable biopic
qui fait revivre sous nos yeux envoûtés l'esprit
de Jim Morrison.
Si on pourra lui reprocher de ne pas assez se concentrer sur
la création artistique, centre névralgique du
groupe et de son parolier principal, il sera difficile de passer
à côté d'un artiste qui exerce encore une
fascination indescriptible sur le monde. Jim vivait littérallement
ses chansons sur scène, à la manière d'un
J. Brel, il était symbole d'une époque inondée
d'une liberté nouvelle. The doors raconte
le succès foudroyant, bien au-delà de la musique,
presque messiaque d'un jeune homme d'une vingtaine d'année,
plus poète que chanteur, intellectuel en recherche constante,
et finalement dépassé, rongé par cette
drogue et cet alcool qu'il utilisait comme les amérindiens
usent du peyotl lors de leur cérémonies. Pour
chercher la vérité cachée d'un monde en
manque de spiritualité, laisser s'exprimer en toute liberté
cet âme d'artiste qui refusait les contrainte d'un monde
trop matériel. Jim Morrison, à jamais hanté
par l'esprit de cet indien entraperçu, alors qu'il était
tout jeune, sur le bord d'une route accidentée, a vécu
sa courte vie sans contrainte, sans limite, avec désinvolture.
Il est mort trop tôt, alors qu'il prenait toute conscience
de sa destruction.
Monter comme un poème dont le choix des chansons colle
parfaitement au propos du film, montrant ce qui aurait / a pu
les inspirer, The Doors est un long trip hallucinant
et hypnotisant dont on ne peut ressortir indemne, voir changé.
Formidable hommage à des chansons immortels, à
une créativité fulgurante et poétique,
à une inspiration exceptionnelle et à un esprit
qui a laissé une emprunte à jamais ; Jim repose
auprès des plus grands artistes, au cimetierre du Père
Lachaise.
The doors se trouve être à mon
sens le film le plus symbolique de son auteur tant il sied lui
parfaitement : enfant des années 60, assoiffé
de liberté et au passé noyé dans la drogue.