Un crime & un scénariste avec des problèmes
d'argent.
Enveloppé avec l'élégance subtile de Wilder,
celle que l'on ne retrouve que chez les plus grands réalisateurs
de cette époque, et une photographie d'exception.
Et ce scénario ! Sunset boulevard est
pour ma part une oeuvre assez inclassable, qui tient autant
du film noir que du drame. Il discourt sur l'enjeu du passage
délicat du cinéma muet au parlant... au détour
d'une course poursuite automobile ! Et d'un travail pas comme
les autres, pas forcément moral où glorieux. Une
histoire profonde et profondément atypique où
tout participe à l'étrangeté du propos,
des lieux et des protagonistes : comme ce décor qui tombe
en ruine, un peu à l'image de cette ex-star déchue,
de ce "mort" totalement ubuesque au début du
film, de ces soirées décalées, de ces détails
d'une vie en perdition. Une vie : celle de ce personnage extraordinaire,
pourtant hautement imbue de sa personne, surprotégée
par son valet, vivant dans un glorieux et doré passé,
existant à travers un sanctuaire dédié
à son unique image. Une actrice refusant de tourner la
page de la modernité et confrontée au drame de
l'âge : car c'est bien de cela qu'il s'agit, plus que
d'un problème bassement technique.
Boulevard du crépuscule est une magnifique
réflexion sur l'art de la comédie au temps du
muet, un hommage à sa finesse, celle qui se lisait sur
les visages des comédiens (Cf. le jeu sans retenue de
G. Swanson). C'est également une incroyable et complexe
histoire d'amour qui ne répond absolument pas aux canons
hollywoodiens, qui plus est double ; double tentation contrariée
et complexe.
Boulevard du crépuscule est une réflexion
habile sur le cinéma, l'envers d'un décor impitoyable,
qui vous fait et qui vous détruit quand il le désire,
une réflexion sur les modes et sur le statut des actrices
au cinéma, vite périssables pour les studios.
Toujours aussi contemporain...
Boulevard du crépuscule est une œuvre
où l'émotion est palpable à chaque plan,
où les révélations du scénario participent
à notre vive émotion. Le final est un sommet,
bouleversant de compassion, sublime drame souligné de
paillettes. Terrible. Immortel, intemporel.