Blue Jasmine : de petits airs jazzy obsédants,
des aller-retour dans le temps et la richesse, l'exploration
de deux mondes aux antipodes, à la fois léger
et grave et d'un parallélisme impeccable et goûteux
: le 1er film social de W. Allen ? Le seul défaut de
cette oeuvre semble être la réalisation un peu
étriquée du patriarche, un rien assomante car
pour le reste... le scénario se construit brillamment
comme un bel édifice jusqu'en sa toute fin et C. Blanchett
nous délivre une prestation exceptionnelle, proprement
habitée et pourtant d'une finesse incroyable : son personnage
de névrosée se démarque définitivement
des faire-valoir habituels de Woody (d'ailleurs la 1ère
scène semble enterrer ce type d'excentrique : on passe
du bavardage incessant à quelque chose de plus posé,
de New York à San Francisco) ; un Oscar serait la moindre
des choses ! N'oublions pas que les personnages secondaires
ont tous de la substance et n'ont rien de figurants sur-payés,
et les thèmes du film sont d'une richesse assez impressionnante
si l'on juge des autres oeuvres sorties la même année
: la complexité des relations amoureuses et humaines,
le mensonge (aux autres et à soi-même : lorsqu'on
se demande si l'herbe est plus verte ailleurs) ; Woody utilise
son "héroïne" prétentieuse et hautaine,
se surprend la malmener et va lui remettre violemment les pieds
sur Terre dans ce qui reste une ode à l'amour des gens
simples, une ode à la simplicité ("Les gens
heureux n'ont pas d'histoire"), une véritable et
extrêmement puissante leçon de bonheur qui génère
une foule d'émotions et qui me touche tout particulièrement
de par son thème générique : il en faut
vraiment très peu pour être heureux. Bien aidé
par un montage astucieux et terribelement fin et bien dosé.
Un très grand cru Mr Allen, un film qui fait du bien
et une oeuvre indiscutablement sociale, bien ancrée dans
son époque et qui en dit long sur ce que pense et à
toujours pensé l'auteur anti-Hollywoodien de la pauvre
valeur des priorités de ses contemporains...