Un film essentiel, un film utile, une leçon qui a l’avantage
certain de ne pas être purement pédagogique, didactique
et encore moins naïve : c'est également une leçon
émotionnelle, de celle qui imprègne le plus. Un
film que tout un chacun devrait inscrire sur une liste, comme
favori, œuvre à revoir, afin de, en regardant son
nom, ne jamais l’oublier, ne jamais oublier son contenu.
Un film dévoué corps et âme à démonter
l’absurdité, l’inhumanité et la lâcheté
du racisme. Il en démontre toute le mécanisme
: l'éducation première, le drame déclencheur,
les fausses théories, la réfutation de la vérité,
la montée de la haine, la provocation, le sentiment de
supériorité, l'auto-satisfaction confiante, la
croyance désormais aveugle…. Mécanisme édifant
et mis à jour avec précision, de façon
presque ambiguë au début -ou plutôt efficace-
afin de mieux faire tomber ces pseudo-certitudes acquises sans
grandes déclamations, envolées lyriques ou moralismes
d’arrière-garde. Le scénario préfère
prouver simplement que le « raciste » n’est
en fait qu'un faible qui se cache derrière le mensonge,
cherche un bouc-émissaire à son problème
plutôt que chercher à résoudre celui-ci
en réfléchissant, en analysant, en remontant ses
manches, faisant un effort intellectuel et se prenant par la
main (dans le film son père meurt et a déjà
instauré un terreau idéal pour ce genre de pensées).
Le scénario va alors effectuer une mise en abîme
en immergeant cet homme dans sa propre haine, cette prison,
où il y a plus de noirs que de blancs, où les
rôles paraissent avoir été sont inversés
; en lui montrant sa soudaine isolation (raciste pure et dure
qui refuse de se serrer les coudes et finit rejetté par
tout le monde, haïs et humilié).
Au final deux choses essentielles (on y revient) font surface
: la haine est bétifiante, inutile (elle ne fait jamais
progresser et ne dirige pas notre vie vers le meilleur), invivable,
pourrissante et abjecte, elle ronge celui qui la produit et,
par un effet pervers de miroir, bousille la vie de son entourage
(la mère maladive, le frère qui finira mal), la
détruit lâchement et égoïstement. La
seconde chose est l’un des aspects principals du problème
: l’éducation (très brillamment mise en
exergue dans le film) ; c’est-à-dire ce qui forme
le futur homme, ce qui lui impose la « vérité
» et fonde les bases de ce qu’il deviendra. Si la
vérité est tronquée, si les bases sont
fragiles, alors l’homme chutera irrémédiablement
et ratera sa vie. Tout est une nouvelle fois affaire de responsabilité.
Ce film est un appel vibrant à l’amour, plus facile
à enseigner que la haine (les enfants ne sont-ils pas
trop fabuleux pour qu’on leur enseigne la haine ?), il
est servi par des comédiens extraordinaires et une réalisation
au couteau, ciselée, blessante (l’angoissant montage
de la fin qui rebondit sur un autre problème…)
et puissante. Un chef-d’œuvre.
Avant de finir je voudrais m’élever contre la censure
odieuse et hypocrite (ce film propose un remède à
un très grave problème de société,
merde !) qui l’a affublé et honteusement desservi
; une nouvelle preuve que celle-ci se situe bel et bien toujours
trop à droite. N’hésitez pas : il faut le
montrer dans toutes les écoles.