Photo jaune & blanchâtre : l'univers froid, unicolore
des asiles psychiatriques, antichambres de l'humanité.
Vol au-dessus d'un nid de coucou s'impose
à nous grâce à des gueules de cinéma
et des personnages que l'on n'oubliera jamais plus, servis par
des performances d'acteurs à tomber par terre de par
leur palette extrêmement diversifiée de talents
(Brad Dourif, Danny De Vito, Christopher Lloyd, Louise Fletcher...etc)
avec, en tête, un J. Nicholson en meneur de fous au charisme
extraordinaire : où comment faire de protagonistes apparemment
détestables pour certains (McMurphy en tête, lorsqu'on
a vent de son passif...) des êtres touchants.
L'infirmière Ratchet devient également et très
vite un personnage charnière. Pernicieuse, psycho-rigide,
elle est l'expression ultime de son travail d'infirmière
psychiatrique : voyant sa domination remise en cause, l'efficacité
de son travail brisé, repoussée qu'elle est dans
ses derniers retranchements, voyant ses habitudes bousculées,
elle est le signe d'une lutte de pouvoir et de domination, dans
un système inhumain qui répond à la violence
par la violence au travers de scènes choquantes qui s'apparentent
ni plus ni moins à de la torture...
Vol au-dessus d'un nid de coucou est l'analyse
d'un microcosme, en huis clos, dur, inflexible et quelque part
régalien : comment un élément perturbateur
va essayer de briser un semblant d'organisation, d'équilibre
; ou apporter un nouvel équilibre ; ou un peu de....
folie dans un monde pas loin d'être spartiate, réglé
comme du papier à musique, qui va donner à chacun
quelque chose qui lui manquait, un rien d'humanité (jeux,
amitié, cigarettes, femme, match de baseball, amusement...).
De liberté.
Vol au-dessus d'un nid de coucou est une ôde
poignante à cette liberté et la recherche de soi,
comédie enjouée et fortement drôle (avec
une partie de basketball mémorable) couplée à
une véritable réflexion sur la folie, celle de
chaque pensionnaire et surtout celle supposée de McMurphy
: est-il un être dangereux, libre, dément ou simplement
un rebelle qui a tellement rejetté les règles
de la société qu'il a franchi les limites des
libertés que celle-ci accorde ?
A titre strictement personnel ce film joue avec moi sur la peur
de devenir aliéné, privé de ma raison et
de ma liberté de conscience, plus que privée de
celle d'aller où bon me semble.
Sa mise en image peut sembler trop contemplative mais elle laisse
le champ libre à chacun de ses acteurs, c'est une réalisation
discrète qui laisse parler les images et s'avère
plus subtile qu'il n'y paraît.
Vol au-dessus d'un nid de coucou est une comédie
qui compense la violence traumatisante mais libératrice
du final ; des images qui vous imprégnent durablement.
De toutes façons je suis toujours autant ému par
les dernières minutes du métrage... cette dernière
image peut avoir tellement de résonnances : humaines
(l'indien ne parait pas être un danger pour la société),
historiques (le fantasme d'une libération amérindienne
?) ou encore psychologiques (McMurphy ne "part-il"
pas avec lui, selon ses dires ?).
Puissant.