La force et tout à la fois l'intelligence du film de
Stone est de n'être jamais manichéen mais toujours
orienté vers une recherche sincère et honnête
de la vérité ; d'ailleurs maître-mot du
procureur durant le procès final.
Mais J.F.K. ne se limite jamais à n'être
qu'une oeuvre adroite, c'est un film de cinéma à
la photographie idyllique et un formidable travail de reconstitution
qui s'appuie sur des stock-shots mélés habilement
à des séquences reconstituées ; il nous
plonge littéralement au coeur du sujet et ne nous lâche
jamais. Sa réalisation est vibrante et pleine d'ardeur,
son montage et son rythme soutenu du début ne ralentira
jamais une fois l'enquête lancée.
J.F.K. est un scénario pétri
d'ambition, provocateur et destiné à soutenir
la mémoire collective. De ce travail de recherche -inspiré
par 2 livres- il s'en dégage moult hypothèses
qui déboucheront perspicacement sur des théories
osées et compromettantes : où comment on y apprend
que L. H. Oswald -marxiste & agent secret dont la vie nous
sera dévoilée en détails- n'aurait jamais
pu tuer Kennedy puisque il n'était qu'un mauvais tireur
équipé d'un mauvais fusil ; fusil qu'il n'a peut-être
jamais tenu.
L'intrigue tourne autour de supposés communistes mêlés
à d'anti-castristes, d'une commission d'enquête
qui ne fait pas le travail pour lequel elle a été
nommée, de coups de feu et de témoins passés
sous silence, ainsi qu'une protection présidentielle
grandement défaillante et des évènements
post-attentat particulièrement fumeux. Jusqu'aux suspicieux
morts en cascades. Des preuves qui soutiennent des hypothèses,
qui conduisent elles-mêmes à la théorie
des tireurs multiples, du tir triangulaire ou encore de la balle
magique. Et à un certain Jack Ruby qui aurait joué
un rôle clé sur le terrain.
Mettant peu à peu à jour un complot d'une ampleur
ahurissante, essayant de démêler un imbroglio phénoménal,
J.F.K. met en lumière avec une telle
clarté que le film se suit comme un polar de la meilleure
des trempes. D'ailleurs si ce n'était vrai, on croirait
à un roman aussi sombre que tortueux. Le drame se transmute
en un film de procès mettant la justice américaine
face à ses contradictions, tiraillée par des intérêts
politiques et financiers, à la solde d'un état
tout puissant, lui-même servant de riches entrepreneurs.
Bien loin des fumeuses théories complotistes auxquelles
on assiste de nos jours, délirantes et totalement imbuvables,
le film est fortement documenté, précis, étayé,
éloquent, il avance preuves à l'appui la force
non-démocratique d'intérêts non étatiques,
celle de sombres puissances parmi lesquelles l'armée
; et en profite pour mettre à jour l'envers du décor
de l'ignoble guerre du Vietnam. La densité du dossier
est effarante ! La conclusion m'a scotché à mon
siège.
Le format restera percutant, électrique, de but en blanc,
appuyé par l'un des plus impressionnants castings de
l'histoire, à l'éclectisme respectueux, à
la variété qui donne le vertige (Costner, Pecci,
Rooker, Spacek, Oldman, Lee Jones, Sutherland, Bacon, Lemmon,
Matthau, Candy, D'onofrio...) . Un drame épais magnifié
nerveusement et efficacement par la musique surpuissante de
J. Williams.
"Plus le mensonge est gros, plus les gens le croiront".