INTERVIEW
du réalisateur Cédric KLAPISCH
(à l'affiche avec Casse-tête chinois) |
Etait-il facile, lorsqu'on se nomme C. Klapisch, de monter un film à plus de 15 millions d'euros où ça reste un parcours du combattant ? Non je pense qu'à chaque film c'est compliqué pour moi quand le budget est supérieur à 5 millions… Là, ça a été vraiment difficile de rassembler les 14 millions nécessaires pour fabriquer ce film, malgré le fait que c'était un "3". J'imaginais que ce serait quand même plus rassurant et facilement identifiable pour les financiers… Je ne sais pas pourquoi mais je sens que pour moi en tout cas (et quoique les gens puissent penser) chaque film a toujours été un parcours du combattant pour le financement…
Beaucoup trop pour faire une liste qui ait du sens. J'aime trop LES acteurs... C'est compliqué de parler des acteurs en général sans avoir en tête un personnage à incarner. Toi qui a étudié et tourné à New York, tu n'as jamais été tenté par "l'expérience américaine", avec gros budget à la clef, stars, diffusion plus large (mais moins de liberté) ? Non justement comme j'ai fait des études aux USA, après cela, je n'ai pas eu le "rêve américain". J'ai vite vu chez des collègues comment ce rêve peut se transformer en cauchemar. Comme tu l'évoques dans ta phrase, je choisirai toujours la liberté par rapport au fait d'avoir un gros budget une diffusion plus large ou des stars… Après mes 11 longs métrages, je sais que le seul privilège pour moi c'est la liberté de création…
La France est un des rare pays au monde où on a une vraie liberté
de création. C'est lié au système de financement
"solidaire" mis en place après guerre et géré
par le CNC et les obligations des chaines de TV mises en place dans
les années 80. C'est évidemment compliqué de comparer
ça aux autres cinématographies européennes, asiatiques
ou américaines... Pour rester dans le sujet : Je ne sais pas si tu as réagi à la polémique sur le financement du ciné français : as-tu quelque chose à ajouter au débat qui fait rage ? La TV ne tue-t-elle pas le cinéma français et son ambition (en 2013, 14 films budgetés à plus de 10 M€ ont été des bides très importants) ? Je pense comme tout le monde qu'il y a eu des abus. Il y a eu un coté
"robinet ouvert" pour certains acteurs ou certaines productions.
C'est plutôt positif de rentrer dans une période où
dans le cinéma comme ailleurs il y aura moins de gaspillage et
on fera plus attention. Pour revenir au débat lancé par Maraval, je suis contre
le fait de pointer du doigt les dépenses publiques. Le système
français est un exemple de réussite sur la notion de répartition
solidaire. Une taxe est prélevée sur le prix du billet
et répartie ensuite de façon assez vertueuse dans la création
française. C'est trop facile de dire "ça ne sert à rien" la création, l'art, la lecture, le cinéma, la danse. Aurélie Fillipetti a eu raison de rappeler il y a quelques jours que le secteur de la culture "contribue 7 fois plus au PIB français que l'industrie automobile avec 57,8 milliards d'euros de valeur ajoutée par an…" On ment aux français si on ne dit pas que le cinéma est avant tout un secteur économique actif ET rentable…En 2012, 29000 personnes ont été engagées à différents postes dans l'industrie cinématographique.Quel journaliste parle de ça ?
Ce n'est pas forcément à moi de commenter le nombre d'entrées d'un de mes films… Mais puisque vous me demandez, j'ai senti qu'en période de crise, le fait de parler de la réalité de la crise n'est pas forcément ce que le public a envie de voir… Les gens ont plus clairement envie de rêver. La fin volontairement tournée vers le cynisme de la réalité actuelle dans Ma part du gâteau a gêné. Si j'avais fait une fin plus proche du discours positif et humaniste de Intouchables ou plus hollywoodienne comme celle de Pretty woman j'aurais sans doute fait plus d'entrées. Mais personnellement je ne renie pas ma fin plus "politique"… Casse-tête chinois n'a pas exactement connu le même accueil que les 2 précédents opus : c'est le genre de chose qui stopperait ton envie de voir ce qu'il advient à Xavier à l'âge de 50 ans ? Non je pense qu'on peut espérer approcher 2 millions d'entrées à la fin de la carrière du film. Je crois qu'on devrait être le 4ème ou 5ème résultat des films français cette année. Franchement ce serait déplacé pour moi d'être déçu d'un tel résultat. Je reçois tous les jours des messages ultra positifs de spectateurs sur le film. Je vois bien en fonction des différents retours que j'ai eu qu'il n'est pas en dessous des deux autres. Ce que j'ai dit pendant toute la promo c'est que je ferais un 4ème épisode si j'en ressens l'envie dans 10 ans. Je ne place pas les entrées comme moteur principal d'un éventuel 4ème projet (mais bon, si Casse-tête avait fait 300 000 entrées il est clair que je ne dirais pas la même chose…) Film social, comédie, SF, policier... tu as abordé nombre de genres différents : tu te vois, demain, réaliser un film d'horreur si le scénario te botte ? Ou un film bourré d'effets spéciaux façon Avengers ? Non autant je peux me voir faire un film de pirate, un western, un film d'époque, une comédie musicale, un film plein d'effets spéciaux pour créer un univers particulier oui mais un film d'horreur c'est pas du tout mon truc... Scorsese / Di Caprio - Burton / Depp : mais pourquoi as-tu aussi souvent fait tourner... Z. Soualem ? Parce que c'est mon seul vrai ami acteur et que je ne me vois pas faire un film sans lui, sans compter qu'accessoirement c'est un grand acteur… Si tu devais ne retenir qu'un seul film de ta carrière de réalisateur, sans pour autant renier les autres bien sûr, quel serait-il et pourquoi ? Le Péril jeune. Je ne saurais pas expliquer pourquoi. Ce film est sans doute le moins bien réalisé de tous mes films mais il reste le plus "gracieux"…
Je dirais avoir un César (mais sans doute parce que je n'en ai jamais eu…) Es-tu un réalisateur qui lit les critiques de ses films ou tu te fous de savoir que Les cahiers du ciné n'aiment pas trop tes oeuvres ? Je ne lis plus… J'ai rarement lu des articles "éclairant"
pour moi, par contre j'ai lu beaucoup de fiel… et le fiel n'aide
pas beaucoup à s'améliorer ou même à se remettre
en question. beaucoup.
Pas besoin
J'adorerais…
J'ai vite compris qu'il ne valait mieux pas…
Fellini, Truffaut, Renoir, Hitchcock, Kurosawa, Forman, Altman, Woody Allen, Scorcese. A l'heure actuelle quels sont les réalisateurs dont tu ne rates jamais un film ? Je fais comme tout le monde j'attends le buzz pour savoir si c'est
un Scorcese ou un Woody Allen que j'irai voir ou pas… Quels films retiendras-tu concernant l'année 2013 ? Gravity, Suzanne, Neuf mois ferme, La bataille de Solferino, Elle s'en va, Django, Adèle, A touch of sin. Merci Cédric de m'avoir accordé du temps et félicitations
pour avoir aligné 4 films consécutifs à plus d'un
million de spectateurs :
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