Les
yeux de Julia |
Guillem
MORALES |
(13-14) |
Une femme aveugle se donne la mort... mais elle parait
ne pas être seule au moment de son suicide : que s'est-il réellement
passé ? Le film fonctionne et s'appuie avant tout sur ce mystère,
le spectateur ne sachant pas où il met les pieds, dans quel genre
de film il vient de s'embarquer (l'étiquette fantastique restant
infime). En multipliant les choses intriguantes, les personnages ambigus
et sans lien apparent avec l'histoire, les secrets pernicieux, avec aux
commandes un réalisateur qui connait parfaitement la grammaire
cinématographique et nous guide parfois en aveugles, avec un scénario
qui ajoute régulièrement une nouvelle pièce à
ce puzzle complexe et attirant, le film part au quart de tour et ne nous
lâchera presque plus. Et justement à propos de ce scénario,
à force d'en mettre une couche on risque de trouver qu'il pousse
le bouchon un peu loin (notamment tout ce qui touche au mari). Mais à
ce stade, le film n'est qu'à moitié débuté.
La seconde partie est sans doute moins agréable bien que tout aussi
bien faite ; comme un petit air de giallo (genre souvent tué par
un bouchon qui va trop loin, justement, ou par un tueur qui sort d'on
ne sait où... tient ?), l'impression de deviner ce qui va se passer
en déduction de l'introduction, un côté un peu tarabiscoté
qui mérite d'amples explications (les aura-t-on ?). Mais on continue
de marcher, un peu moins bien qu'au début, certe, car le film reste
diablement efficace, il se retourne sans cesse, nous laisse un doute permanent
quant à son dénouement (Fantôme ? Voisine ? Rêve
? Tueur ? Joker ?) et le mystère garde toute son opacité.
Pourtant on sent que ce côté mystérieux est mieux
traité qu'il n'est réellement intéressant ; réponse
en 3ème partie. Car cette fois, dans une ample conclusion, le spectateur
sait effectivement tout et le film vire au slasher assez classieux, conservant
cependant sa marque de fabrique, les twists à tout va, les enchainant
frénétiquement et explorant le thème du film un peu
plus visuellement que thématiquement. On a donc les explications
: mais nous satisfont-elles pleinement ? Non. Ce sera par conséquent
un bon film dont la "forme" scénaristique prend un peu
trop le pas sur le "fond", comme si son efficacité était
un peu forcée. |