Une rencontre qui bouleverse toute une existence...
Dans un champ de ruines, l'ouverture d'une porte qui ne donne sur rien déclenche sur notre monde un séisme et un déferlement de magie, nous permettant de découvrir une somptueuse légende, belle et riche, au gré d'un voyage à travers le Japon.
Impossible de passer à côté d'une oeuvre visuellement phénoménale, un enchantement de chaque instant pour le regard : sans avoir vocation à être photo-réaliste, Suzume nous fait découvrir le monde -un monde encore plus beau que la réalité. Shinkai n'a pas à rougir de sa mise en scène, aussi libre et puissante -plus sans doute- que s'il s'agissait d'un film live.
S'il débute comme une très classique chronique de l'adolescence et de l'amour "love at first sight", puis sur le fameux passage de l'adolescence à l'âge adulte et responsable, le film élargira bien vite son champ d'application à celui de la bonté humaine, celle que l'héroïne croise à chaque scène et qui l'aide dans sa quête. Et puis la richesse thématique de l'oeuvre finit de nous embarquer. Suzume évoque un passé dont les ruines, à travers tout le film, sont les puissants vestiges d'un monde qui a conu son heure de gloire mais qu'un funeste destin à condamner à la mort et à l'oubli ; des ruines comme le sont cette chaise -ultime symbole de la présence d'une mère défunte- et l'ombre de cette mort qui plane sur tout le scénario.
Suzume enfonce le clou avec ces fameuses portes qui évoquent le passage du temps et ouvrent à la fois sur le destin et sur un sinistre malheur (nous allons y revenir), elles ouvrent à la fois sur le passé -mort par essence- et sur la Mort elle-même, là où chacun se retrouvent dans une espèce d'éternité figée, éternité verrouillée par une boucle temporelle somme toute logique que le final mettra en exergue avec une force rare. Quand l'idée d'un futur radieux sauve un passé assoubri par la perte d'un proche... Extraordinaire.
Le personnage assez énigmatique du Verrouilleur contraste avec l'innocence et la limpidité de Suzume : le scénario ne donne que quelques pistes sur son rôle, son histoire, et nous permet de laisser notre imagination divaguer longtemps après la vision de l'oeuvre.
Suzume évoque, enfin, le traumatisme des séismes qui secouent depuis toujours le Pays du Soleil Levant, et notamment à travers la mémoire du terrible tsunami de 2011. Le film alerte et rappelle la situation mondiale actuelle et nous fait entendre métaphoriquement que nous pouvons refermer ces terribles portes climatiques qui dérèglent le climat et provoquent la mort. A nous de trouver nos Pierres...
L'amour, le temps, le climat, les légendes, des mondes parallèles : autant de thèmes qui traversent toute la filmographie, tout du moins récente, de Shinkai.
Finissons avec la cerise sur le gâteau : cette musique exceptionnelle, entre variété ringarde et mélodies aux envolée lyriques surpuissante. Beau.