Bonne chère ?
Ratatouille, c'est un sujet
Ô combien croustillant d'originalité, à
la réalisation délectable qui ne manque jamais
de vous entraîner, avec un doux regard sur la France
via sa cuisine (mais pas uniquement...) ainsi que sur un Paris
sublime et sublimée jusqu'au charme de l'appartement
d'Alfredo. L'originalité tient également en
ce message non subliminal adressé aux tenants de la
malbouffe (américains ?) et à cette ambition
de créer un héros attachant à partir
d'un des animaux les plus détestés de l'occident.
Et on ne reviendra pas ici sur l'aspect technique irréprochable
de Pixar : ne regardez pas ailleurs, ce sont les meilleurs
!
Reprenons : Ratatouille a l'ambition d'éveiller
nos sens à la vie d'un restaurant gastronomique, au
monde fourmillant du microcosme de ses riches cuisines, de
réveiller notre passion pour la bonne chère,
pour l'art culinaire, l'inventivité des chefs (et leur
génie pour se réinventer sans cesse... d'où
le titre), métamorphosant la cuisine en un balet aérien
et subtile, pétillant, audacieux et finalement gargantuesque.
Riche d'inventivité visuelle (Rémi guidant son
"humain" par les cheveux : cela tient proprement
du génie !) et de peps, le film vaut toutes les cures
de vitamines C !
Rémi, hanté par l'âme d'un Chef français
-autre idée aussi brillante qu'exquise et audacieuse-,
va donc apprendre à courir après ses rêves
pour mieux les réaliser, dans une oeuvre remuante et
très bien documentée ; le tout doublé
d'une intrigue parfaitement intégrée et d'un
double méchant qui épaissit encore un peu la
trame : l'un, plus entrepreneur que démoniaque, l'autre,
cuistot fantasmé maniant mieux le stylo que la queue
de casserole, devenu critique gastronomique par défaut
et frustration.
On ne manquera donc pas ce regard acerbe sur le rôle
et la légitimité des critiques (en général),
capables du meilleur (la scène de la madeleine de Proust
est vibrante...) comme du pire, pouvant détruire avec
quelques mots, n'hésitant pas à se vautrer dans
le rôle irrespectueux et facile de l'inspecteur des
travaux finis. On notera également un petit parfum
de féminisme, de même qu'une petite pique plus
générale à l'encontre des préjugés,
ainsi qu'un joli refrain sur la famille.
Bien sûr on retrouvera quelques ingrédients plus
convenus, sans doute prévisibles, mais mélangés
avec délectation dans une recette suffisamment épicée
pour trouver le chemin de nos papilles cinéphiliques.
Même la love story, discrète et tendre, n'a rien
de convenue.
Savoureux du début à la fin et certainement
pas une oeuvre "alimentaire".