Le but de toutes critiques de ce film n'étant pas d'en
connaitre la réelle qualité mais bel et bien de
savoir si oui ou non il est anti-sémite, on va commencer
par là. A une époque où, dans certaines
régions reculées, loin de Rome, le pouvoir romain
était suffisamment frêle pour se plier à
certaines exigences des dirigeants régionaux (ici, religieux
: les grands prêtres du temple, cités dans la Bible),
Gibson n'a fait que donner une interprétation plausible,
à demi-personnelle, de la culpabilité, non pas
du peuple juif, mais de certains juifs haut placés et
décisionnaires ; une poignée d'entre eux, suivis
par certains et reniés par d'autres (n'a-t-on pas trop
vite oublié ces juifs qui aident Jésus ?). Car
le film me semble limpide : si la décision est dictée,
si Ponce Pilate plie contre son gré (mais il est clair
qu'il avait tout pouvoir -risqué, certes- de relâcher
le prophète ; d'ailleurs il le dit), la longue scène
de flagellation, torture abusive et hautement démonstrative
(la scène de la croix est presque pire...) est conduite
par de pures légionnaires ROMAINS. N'a-t-on tout simplement
pas effectué une "interprétation" de
l'interprétation afin de polémiquer autour d'un
sujet qui crée toujours de stupides polémiques
infondées ? La Bible ne donne-t-elle pas le même
rôle aux prêtres et aux romains ? Bien sûr
que si ! Je crois que l'on confond une fois de plus un peuple
avec ses représentants, grave erreur qui conduit, elle,
au racisme et à la ségrégation. Gibson
n'a fait que prouver sa (trop ?) grande foi.
Au fait : le film en lui-même n'est pas très bon
du tout. Entre couleurs criardes que ne renierait pas un Joel
Silver, et grammaire cinématographique d'un réalisateur
qui s'est énormément appauvrit en l'espace d'un
film (Cf. les longues minutes de métrage montées
dans une ralenti faussement dramatique), on assiste à
une oeuvre en rien novatrice sur le sujet, hors mis qu'il lui
insuffle -caressant les catholiques dans le sens du poil- lourdement
sa verve sur l'agonie d'un symbole du christianisme. Au mieux
un film gore light (ça choquera les téléphages)
pseudo-réaliste, au pire un film mythologique lourd,
démonstratif, décapant, assez joli et avec de
grands moments.
NOTE : 10-11 / 20