En éliminant l’erreur "scientifique"
grossière de l’original (de Kurt
Neumann), Cronenberg y a gagné en réalisme
et en pathétisme. Il nous livre ici un travail abouti
tant sur le plan scénaristique (la décadence physique
méler aux conflits intérieur du héros ;
métaphore de la dégénérécence
ineluctable du corps humain) que sur le plan visuel (réalisation
toujours en adéquation au sujet). Les effets spéciaux
fonctionnent à merveille (Chris Walas impose définitivement
son talent), les acteurs sont irréprochables (Goldblum
y trouve son plus grand rôle avec celui de Mr Frost).
Un Cronenberg toujours aussi charnel et viscéral mais
un plus grand public.
2nde vision : Derrière l'excitation de la découverte
scientifique, il y a ses limites, les dangers qui apparaissent
avec l'expérience empirique. Du fantasme futuriste aux
possibilités immenses jusqu'à l'imprévisible
cauchemar, la réalité se cache toujours derrière
le rêve. Le scénario nous fait vivre toutes les
étapes, depuis l'excitation du début jusqu'à
l'intensité du cauchemar final
Cronenberg, en passant par Hollywood, nous livre l'un des meilleurs
remakes de l'histoire du 7eme art, en s'appropriant le thème
et l'univers et en l'adaptant à son univers, ses propres
visions, ses obsessions ; selon lui l'homme n'est fait que de
chair, il est intimement viscérale. Son corps n'est qu'un
habitacle, transformable, toujours en mutation. La transformation
de la chair est aussi la transformation de l'âme : transformation,
ici, parfaitement détaillée, précise, chirurgicale
et psychologique. Hideuse et absolument terrifiante. Glaçante.
Gorissime.
Le film ne se borne pas qu'à corriger l'aberration scientifique
de l'original -progrès des FX aidant- mais il élève
une série B au rang de chef-d'oeuvre d'un genre trop
souvent méprisé.
Car derrière tout cela il y a de nombreux thèmes
qui émergent : depuis le mythe de l'homme augmenté
: la prétendue supériorité de la science,
celle qui ne voit qu'à court terme et oublie les conséquences
à longue échéance ; cet Homo Superior qui,
finalement, retrouvera son instinct animal et, à trop
vouloir jouer les dieux, disparaîtra. D'ailleurs il est
intéressant à ce propos de noter que l'ex petit
ami embarrassant, dragueur lourdingue mais simple homme, se
transformera ici en homme providentiel...
Il y a tout autant, et ça découle de ce que je
viens de dire, le thème du savant fou : ici ce n'est
pas tant un fou qu'un savant dépassé par sa propre
ambition, aveuglé même. Cette fois le savant ne
créera pas quelque chose de nouveau : il se transformera
lui-même. Et le film de rendre un hommage appliqué
aux films de monstre : ce dernier enlèvera la belle,
avec toute la mythologie qui va avec, mythologie vieille comme
le cinéma (voir Frankenstein, King Kong, La créature
du maraiset tant d'autres).
Une œuvre toujours aussi impressionnante aujourd'hui, toujours
aussi riche. Un final grandiose où l'homme reprend le
dessus une dernière fois.
NOTE : 17-18 / 20