J'ai rarement vu plus intense cacophonie cinématographique
: et pourtant Dieu sait que j'aurais souhaité aimer ce
film. Film à sketches oblige, celui-ci est inégal
; particulièrement inégal. Le sujet est pourtant
ambitieux autant qu'épineux et grave (l'antisémitisme)
et on est absolument ravi de voir un auteur français
s'engager dans un combat, tout en essayant de faire rire. Si
le premier sketch fait illusion en s'attaquant aux extrêmistes
du FN, métaphore de la substantifique moëlle de
ces sous-nazis (haine aveugle, irraisonnée et surtout
mensongère et très électoraliste). Même
si l'idée est un peu plus fine que celle d'un Agathe
Cléry on reste en surface, n'attaquant jamais
frontalement et profondément leurs idées floues,
farfelues et surtout franchement hypocrites et jamais lucides
(suffit de voir le niveau intellectuel des gens auxquels ce
parti s'adresse). Car en 2016 tout le monde sait que l'on a
tous du sang juif, arabe, peut-être même noir ;
nous avons tous la même couleur de peau, le m^me sang
et le même code génétique. Puis le sketch
de Boon fait encore baisser l'ambition du film : mal amené,
mal développé, mou et jamais probant. Enfin, le
segment sur "Jésus" enterre l'oeuvre : épisode
étonnamment farfelu, raté à tous les niveaux
et où même les scénaristes s'excusent du
traitement infligé ("On est le Mossad ou pas")
; Un prophète remplacé par un quidam et autre
joyeusetés fantastiques autant que fantasques. Le problème
c'est que le film ne sais pas, ne saura jamais sur quel pied
danser, s'attaquant de biais aux préjugés et au
racisme en général plutôt que de front.
On pensait finir sur une note assez subtile avec l'éclosion
d'une nouvelle ségragation joliment crétine puisqu'en
fonction de la couleur des cheveux -notamment ; mais on s'embourbe
encore dans du grand-guignol où l'absurde le dispute
à une critique de surface, trop rapide pour faire son
oeuvre. Et c'est d'ailleurs tout le problème de ce film
encore une fois ambitieux : il restera très peu maitrisé,
mou et trop léger. Combien de gags à la fois lourds
mais vide de sens pour celui, particulièrement génial,
sur les "ramoneurs" : la subtilité de l'étude
d'un texte religieux est particulièrement écorchée.
Jusqu'en cette fin qui n'a guère de sens dans le contexte
actuel ; plutôt un fantasme éveillé et naif,
complètement à côté de la plaque.
Il y aurait bien les segments intermédiaires où
I. Attal se met en scène, liant des autres sketches,
mais il s'agit justement de segments qui paraissent sortir complètement
du... film ; notamment leur conclusion, particulièrement
intelligente. Un beau ratage et un vilain gâchis.
NOTE : 6-7 / 20