La société de demain (d'aujourd'hui ?) et le
repli extrême sur soi-même via la technologie, repli
sécuritaire qui nous permet de "maîtriser"
notre interlocuteur sans s'encombrer des complexités
de l'espèce humaine ; en particulier de l'amour ? Ce
film est un genre d'extension de la réalité actuelle,
ce quotidien où l'on trouve l'âme soeur sur le
web, où l'on se parle et se dit "je t'aime"
en SMS, où l'on fait l'amour virtuellement, par webcam...
Les accrocs aux nouvelles technologies que nous sommes, complètement
addicted, ne seraient qu'une espèce d'homo ordinatorus
en train de faire de nos machines des êtres à part
entière, près à être aimer ; et après
? Et après il y a "Her". Un programme qui évolue
de façon totalement autonome, sans la patte humaine.
Jonze nous offre un film langoureux comme une histoire d'amour,
pas toujours très délicat et d'autant plus touchant,
proche de nous et loin des canons hollywoodiens, il explore
l'homme de fond en comble par le biais d'une confidente chaude
/ froide et un véritable regard d'artiste ; superbes
images, magnifiques dialogues à fleur de peau et musique
adéquate. C'est une oeuvre très profonde sur une
machine découvrant l'humanité alors que l'humain
se déshumanise, un film en profondeur comme jamais il
n'avait été fait, comme jamais on n'avait encore
pu ressentir cette troublante transformation qui perturbe nos
propres sens et nous met en émoi. Très sensuel,
incroyablement moderne dans son approche et d'une justesse rare.
Une riche analyse de l'état amoureux, une approche tant
humaine que socio-culturelle qui permet aux sentiments de transpirer
depuis l'écran jusqu'en nous et de nous délivrer
une vision extraordinaire de l'amour : ses différents
stades, l'amour sans partage, la jalousie, le sexe, la rupture...)
; un amour sans chichi, passionnant et fascinant qui parlera
à un moment ou à un autre à chacun d'entre
nous. Le véritable amour peut même se passer de
"corps", cette matière superflue (la femme
subterfuge s'avérera inutile) que l'on élève
au rang de "canon" et qui perturbe notre appréciation
de l'autre : voici le message profond du film, dévoilant
le véritable amour, loin de la simple et trompeuse beauté
(Cf. la laideur accentuée des protagonistes), plus près
du coeur. Un film qui part à la recherche de notre dernière
part d'humanité...
NOTE : 15-16 / 20