Delicatessen est une BD animée aux
couleurs brunes & chair, nous présentant un monde
relativement nouveau, celui décrit par le duo Jeunet
/ Caro ; avec ses codes, ses sons, ses excès, ses folies,
ses grands secrets, ses gueules de cinéma. Un monde naturellement
-et faussement idéal- vieux, délabré, en
guerre, mais éclairé d'une formidable étincelle
amoureuse et douce, poétique.
Delicatessen c'est également une caméra
sans limites spatiales ni de mouvement, portée par une
réalisation fabuleuse qui rappelle S.
Raimi, avec cette pointe de personnalité toute neuve
(dans recherche visuelle et le travail des cadres), un humour
sépulcral et ultra-plaisant, une inventivité à
toute épreuve, jouant de ce temps qui devient vite le
nerf vital du film (la femme qui ne parvient pas à se
suiccider reste un must !), des acteurs formidables servis par
des portraits démentiels, des décors absolument
superbes et coincés dans un écrin de couleurs.
Une oeuvre majeure bourrée de scènes follement
grandioses, burlesques et croustillantes.
Delicatessen est une attaque, l'air de rien,
contre la sclérose de notre propre monde, notre survie
dans les extrêmes -manger ou se faire manger-, ôde
à la résistance -aux résistances- le tout
sous la forme d'un conte macabre et gourmand d'idées.
Delicatessen c'est, enfin, un cri d'amour immodéré
pour le cinéma, art visuel et Ô combien complet
: d'ailleurs il y a du Gilliam, du Lynch et du Burton dans le
film des compères. Et ce n'est en rien pour me déplaire...