Un conte à la morale complexe et multiple, à
la poésie visuelle inimitable. Car c'est avant toutes
choses les yeux qu'il ravit : des dessins élémentaires
et singuliers possédant leur propre beauté et
un sublimissime encrage à la manière des estampes
japonaises. Puis un le thème bien souvent repris dans
les contes ancestraux : un vieux couple de paysans (tailleur
de bambous) et un don du ciel qui prend la forme de la plus
belle des jeunes filles, cet enfant qu'ils n'ont sans nul doute
jamais eu. C'est une oeuvre tout simplement belle, belle comme
une naissance, partagée entre la musique, la magie, le
crayonné, l'animation, les couleurs et une description
des moeurs d'une tout autre époque. L'histoire nous emmène
à découvrir l'aspect dual d'une société,
entre campagne baignée de nature toute-puissante et ville
où parade la noblesse urbaine, entre pauvreté
toute relative et richesse indécente, entre beauté
et laideur. Le rythme est quelque peu lancinant (c'est également
le plus long film du studio), la magie du début s'évente
quelque peu dans une démonstration un peu lourde (mais
sensée), à travers la fameuse histoire du paysan
devenu prince et celle de la princesse ne trouvant pas l'amour
parmi ces princes de pacotille qui lui sont présentés,
ceux-ci confondant richesse et amour, amour de la beauté
et amour tout court, et pour qui le mensonge est une fin. Ce
film est un appel à la modestie, une oeuvre baignée
de cette nature divine, une magnifique fable sur le bonheur
et la simplicité (d'où le coup de crayon, à
mon sens). Le final y est bouleversant et je voudrais m'attarder
sur celui-ci (en spoilant un peu !). Ma fille était surprise
de voir que le film "finissait mal" alors que le scénario
est à la fois une métaphore sur la mort (on partira
tous en laissant des richesses sur cette Terre : nos familles
; mais en emportant l'essentiel dans nos coeurs : la larmes
finales) et une oeuvre emprunt de bouddhisme et de sagesse orientale
(le bonheur n'est pas dans les attaches que l'on a sur cette
planète). Difficile à admettre dans nos sociétés
occidentales où tout se joue sur Terre et où les
buts de nos vies ne sont pas les mêmes...
NOTE : 15-16 / 20