The second civil War où l'odyssée de quatre journalistes américains à travers des Etats-Unis en guerre.
On est immédiatement happé par Civil war grâce à la réalisation d'une puissance aussi effroyable qu'incisive de Garland, une mise en scène étudiée qui force le regard du spectateur. Avec des instants de grâce absolus comme cet incendie hautement symbolique.
La première grande idée du scénario est d'importer une guerre sur le territoire américain, pays rarement touché directement par les conflits : importer son extrême violence, sa barbarie, ses horreurs, ses exactions, etc... afin de mieux impliquer ce spectateur sevré d'images TV et lointaines qui ne le touchent même plus. Ce pourrait par ailleurs être un film banal sur la guerre : mais son point de vue journalistique lui donne un tout autre relief, aussi passionnant que chacun de ses protagonistes. Et c'est la seconde grande idée du film : regarder de plus près le travail essentiel de la presse sur le front, son rôle clé de témoin, mais sans pour autant oublier de se demander également jusqu'où ce derniers peuvent aller ; jusqu'à la limite de la déontologie ? Filmer plutôt que secourir, chercher le scoop à tout prix, refuser toute prise de partie ? Alors la dernière séquence est teintée d'une ambiguïté salvatrice : elle laisse le spectateur coi en le lâchant avec des questions plein la tête, plutôt que des réponses simplistes qui le prennent par la main et lui refusent tout statut de "personne critique" ; le métier devant obligatoirement être perverti par ses propres intérêts ? Puisque les journalistes ne sont rien d'autres que des hommes, et non des saints : ce qui est symbolisé dans l'histoire par la perte d'innocence de la très jeune reporter tout au long du film...
Dernière idée de génie : amener le spectateur à se demander : qui sont les ennemis ? Qui sont les justes ? Civil war adopte un point de vue journalistique, neutre, sur le conflit et chacune des forces en présence : l'armée du président est accusée de viser des civils et les séparatistes tentent de cacher des charniers humains. La guerre salit tout le monde et la frontière entre le Bien et le Mal s'estompe peu à peu...
Civil war est donc une oeuvre immersive, tendue, stressante au possible, coincée entre un certain chef-d'oeuvre de F. F. Coppola et le ton des œuvres atypiques de Garland, tout en examinant un sujet plus ouvert, plus abordable, mais refusant cependant de ménager le grand public. Un grand film.
NOTE : 15-16 / 20