2023, l'odyssée de Barbie.
On ne peut ignorer l'originalité du projet, son indéniable réussite visuelle -notamment les décors- ainsi que son aspect parodique où le monde des poupées est décrit comme étant affreusement parfait. Parfait ?
Le pitch : la sublime et heureuse poupée Barbie se met soudainement à penser à la mort et prend de la cellulite : alors elle part dans le monde réel pour aider celle qui joue avec elle et dont la dépression semble déteindre sur elle et son petit univers rose.
Barbie s'avère à la fois drôle et léger, jouant admirablement le jeu de l'autodérision, avec une mention spéciale à cette inoubliable scène dans le bureau du CEO de Mattel : on pourrait même croire que Will Ferrell a écrit ses propres dialogues !
Mais Barbie est également un film à deux vitesses où la démonstration du machisme ambiant demeure didactique, voir maladroite, sans finesse aucune ni nuances, notamment lors de la première séquence dans le monde réel. Et c'est, d'ailleurs, exactement le problème que l'on ressent à la vue de la réalisation de G. Gerwig, plutôt anodine dans le genre.
Si le film met en scène tout l'enjeu du féminisme, celui dicté par le patriarcat, ce féminisme de surface, cette perfection dictée par les hommes, il n'oublie pas de souligner sa complexité, loin des clichés et des idéaux. Mais c'est justement à ce niveau que le film se prend néanmoins les pieds dans le tapis en inversant, en pire (la prise de pouvoir par les Ken), une situation... précédemment critiquée (Barbie est la vision masculine de la libération de la femme), pour finalement ériger Barbie en symbole mou et guère convaincant du féminisme. Il multiplie notamment les scènes parasites et vulgairement démonstratives (danses, chants, guerre des Ken et, surtout, la recherche de Barbie par les dirigeants de Mattel dont l'utilité dramatique reste encore à prouver...), pour combler les vides d'un scénario qui a rapidement dit ce qu'il avait à dire.
Ils auraient pu, comme on l'a vu, pousser le bouchon tellement plus loin, plus souvent, plus subversivement, s'ancrer d'autant plus dans le monde réel, celui de la publicité, du cinéma et celui d'internet, qui pousse de plus en plus loin l'utilisation des corps féminins comme de vulgaires produits ou, pire, devient le spectacle un rien décadent et indécent d'une jeunesse qui se dévoile sans fard pour un simple "like".
C'est un succès de cinéma mérité mais mais dont la portée sociale demeurera très modeste.
NOTE : 13-14 / 20