Un écrivain au succès phénoménal
a disparu... En parallèle un enquêteur pour les
assurances se retrouve interné en asile psychiatrique
: il raconte ce qui l'a amené là.
Et une question récurrente : quand est-ce que le héros
perd pied ? La folie s'immisce petit à petit dans l'œuvre,
un basculement imaginatif, gentiment perturbant et loin d'être
déplaisant. Le jeu formidable de naturel de Sam Neil,
les subtiles modifications photographiques créant diversions,
les maquillages lovecraftiens (les premiers à décrire
l’indicible ?), les éclairages très, très
travaillés (Cf. la fin du film, dans le bureau du directeur,
en plan large) auraient dû en faire un film extraordinaire.
Pourtant ce bazar scénaristique un rien déconstruit
laisse souvent perplexe -au-delà de son but premier-,
manquant de teneur, oscillant entre subtilité et grandguignolesque,
restant une adjonction événementielle incongrue.
Les références aux grands classiques n'y font
rien, pas plus que cette espèce de folie tentaculaire
: seul l'explication donnée lors des dernières
scènes permet d'approfondir ce scénario qui trouve
enfin son sujet. Bien sûr il y a ce petit jeu avec le
spectateur (quand Neil parle d’FX, les clins d'oeil à
Big John), cette idée géniale où la folie
devient la norme et cette œuvre littéraire à
la puissance biblique. Dérivant alors sur une intéressante
analyse de la force de suggestivité de la littérature,
une réflexion sur l'art, la création artistique
comme une nouvelle croyance cherchant à supplanter la
religion, l'écrivain / l'artiste devenant ainsi un dieu
tout-puissant ; mais ceci est sans doute amené de façon
quelque peu maladroite et manquant de force de conviction. Inutile
de dire qu’on en ressort un rien paumé. L’évolution
scénaristique vers la qualité reste indécise,
le mécanisme est trop voyant ce qui rend de nombreuses
scènes trop classiques et sans surprises (en comparaison
avec un Twin Peaks, par exemple) ; on ne se sent pas trop impliqué
et le côté effrayant ne laisse aucune trace, ou
presque. En réalité on a l’impression d’assister
à un film trop technique.
Carpenter livre cependant une oeuvre soignée, un travail
impeccable bien que manquant parfois d'un grain de folie visuelle
véritable, jamais caricatural, qui reste un vrai régal
de surprises visuelles (excellent cette image-page d’un
livre) et dont le bestiaire à l'imagination débridée
ouvre les portes de...